Afghanistan : une mère retrouve son enfant qu’elle croyait à jamais perdu

04-03-2014 Éclairage

Après s’être égaré au Pakistan, où il vivait avec sa famille, un petit garçon de huit ans a été emmené en Afghanistan par un inconnu bien intentionné, qui s’est ensuite adressé au CICR pour tenter de retrouver la trace des proches de l’enfant. Récit de cette recherche transfrontalière qui a abouti en dépit du manque d’informations.

Sali accompagné d’Abdul Baqi, collaborateur local du CICR 

Lashkar Gah, Afghanistan
Sali accompagné d’Abdul Baqi, collaborateur local du CICR
© CICR / Enrique Ochoa

Il y a près d’un an, un petit garçon âgé de huit ans, Sali, a été retrouvé errant seul dans les rues de Quetta, la sixième plus grande ville du Pakistan, située à proximité de la frontière avec l’Afghanistan. Sali était perdu, ne se rappelait pas même le nom de ses parents et était incapable de donner la moindre indication concernant l’endroit où vivait sa famille ou le lieu d’où il venait.

Inquiet à l’idée de laisser Sali seul dans la rue, l’homme qui l’a trouvé a décidé de l’emmener avec lui à Lashkar Gah (province du Helmand), dans le sud de l’Afghanistan, pensant que le jeune garçon venait peut-être de la région. À son arrivée, il a averti le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), par le biais de son bureau en ville.

Retrouver la trace de proches portés disparus et rétablir le contact entre les membres de familles dispersées par la guerre sont des composantes essentielles du travail de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dans le monde. Si certains cas sont faciles à résoudre, d’autres prennent des années. Pour Sali, les choses s’annonçaient compliquées.

Un collaborateur local du CICR, Abdul Baqi, s’est chargé du cas et a pris le petit garçon sous son aile. Il l’a même accueilli dans sa famille en attendant qu’une solution à long terme puisse être trouvée pour le placer. Sali a finalement été admis dans un foyer pour enfants géré par le département afghan de la protection sociale à Lashkar Gah, mais Abdul Baqi et les autres collaborateurs du CICR ont continué à lui rendre visite régulièrement et à lui apporter des vêtements et des jouets.

Même si l’on s’occupait bien de lui, le jeune Sali ne cessait de penser à sa famille. « Je rêvais tout le temps de ma mère, de mon frère et de ma petite sœur », confie-t-il. Au foyer, les autres enfants le surnommaient « Sor Salib » (Croix-Rouge). Sali s’y est fait un ami, un garçon appelé Nimatullah, avec qui il discutait et jouait pour faire passer le temps entre les heures de classes.

Pendant ce temps, au bureau du CICR, Abdul Baqi s’attelait à une tâche pratiquement insurmontable : retrouver les parents de Sali sans le moindre élément et donc sans savoir par où commencer.

« Le problème était que nous n’avions aucune idée de l’endroit où il fallait commencer à rechercher sa famille », confie Abdul Baqi.

Après plusieurs fausses pistes, l’équipe a commencé à penser que les proches de Sali vivaient peut-être au Pakistan comme réfugiés. Le CICR a alors mis à contribution ses contacts à Quetta pour qu’ils passent le mot, dans l’espoir que quelqu’un reconnaisse l’enfant et se présente.

Un couple s’est manifesté et s’est même rendu à Lashkar Gah, mais Sali n’était pas leur fils. La situation semblait désespérée et les mois passaient.

La seule indication que Sali avait pu fournir à Abdul Baqi était le nom de l’imam de la madrasa dans laquelle il avait étudié. Un indice crucial.

L’équipe du CICR a fini par localiser la madrasa et retrouver l’imam. Le couple qui était venu à Lashkar Gah en espérant retrouver son enfant a alors promis de montrer une photo de Sali à l’imam en question. Une famille a reconnu le garçonnet sur la photo et est venue en hâte à Lashkar Gah.

L’oncle, le frère, la mère et deux jeunes sœurs de Sali se sont rendus au foyer pour enfants le 7 février, accompagnés d’Abdul Baqi. Bakht, le frère de Sali, l’a reconnu immédiatement. En voyant sa mère, Sali s’est écrié : « C’est elle ! »

 


La famille a été réunie le 7 février à Lashkar Gah. ©CICR/E.Ochoa

La mère de Sali a été submergée par l’émotion. « Je ne pensais pas revoir mon fils vivant », s’est-elle exclamée, pleurant de joie. « Je croyais qu’il avait été dévoré par des loups ou des chiens. Nous l’avons cherché partout, en vain. »

« Je suis heureux de voir ma mère à nouveau heureuse », a déclaré Bakht. « Mon père s’est rendu dans de nombreux endroits pour tenter de le retrouver. Nous l’avons cherché partout. Puis les forces ont fini par manquer. Nous nous sommes sentis impuissants et avons perdu toute envie de vivre. »

Alors que la famille se remettait en route en direction du Pakistan, il aurait été bien difficile de dire qui de Sali ou d’Abdul Baqi – qui avait rempli sa mission contre toute attente – arborait le plus grand sourire.