Le CICR joue son rôle humanitaire dans les exercices militaires

20-09-2012 Interview

Du 15 au 19 septembre, le CICR a assisté pour la première fois aux exercices militaires organisés par l'Organisation du Traité de sécurité collective (OTCS). Un programme de coopération pour 2012-2014 lie les deux organisations. Explications de Laurent Corbaz, chef des opérations du CICR pour l'Europe orientale et l'Asie centrale.

Pourquoi cherchez-vous à créer une interaction avec de telle organisations ?

Le CICR ayant pour mandat de mener des activités humanitaires lors de conflits armés et autres situations de violence, il doit traiter avec tout le monde - y compris avec les autorités politiques et militaire régionales – susceptibles d’être impliquées dans de telles situations. Il importe que le CICR établisse et maintienne un dialogue constructif avec elles afin d’être en mesure de renforcer la protection des victimes des conflits potentiels.

Au niveau politique, nous nous attachons à échanger les vues sur les questions humanitaires pour que la dimension humanitaire soit prise en compte dans l'élaboration des politiques. Sur le terrain, nous estimons qu’il est essentiel de rester en contact - et d’exprimer clairement notre mandat et nos procédures de travail - afin d'assurer une bonne coordination et communication avant, pendant et après un conflit ou autre situation de violence. Nous sommes également prêts à apporter notre concours pour que les normes du droit international humanitaire et autres normes internationales applicables soient prises en considération dans les règles d'engagement et les règles applicables à l'usage de la force.

Le CICR estime qu'il est naturel et capital pour son travail d’entretenir de bonnes relations avec l'armée et les forces de sécurité dans toutes les situations de violence armée, mais il est par ailleurs fermement convaincu qu'il faut toujours maintenir une distinction entre les activités militaires et les activités humanitaires. Les organisations humanitaires doivent préserver leur neutralité à l'égard des parties dans une situation de conflit, leur impartialité envers les victimes et leur indépendance.
Les organisations régionales, pour leur part, reconnaissent l'importance des organisations humanitaires comme la nôtre, ainsi que la nécessité de transparence et de coordination, qui sont à la base d’un dialogue substantiel et constructif. Nous sommes heureux d'engager un tel dialogue avec l'OTSC. Le fait que nous ayons été invités à assister aux récents exercices militaires semble attester un certain niveau de confiance et de reconnaissance.
Quel a été exactement votre rôle dans les exercices ?
L'objectif premier consistait à établir une interaction avec le commandement des Forces collectives de réaction rapide (FCRR) constituées des contingents militaires des États membres pour s'assurer que les opérations sont menées dans le respect du droit international humanitaire et des autres normes internationales applicables. En coopération avec les Forces, nous avons aussi organisé des séances d'information sur le mandat et les activités du CICR pour les participants aux exercices. En outre - et c'est sans conteste la partie la plus intéressante - le personnel du CICR a participé directement aux exercices pratiques, il a agi exactement comme il l’aurait fait dans des conditions réelles (suivi des besoins et visites des personnes arrêtées. D’une manière générale, nous sommes très satisfaits du résultat. Il faut répéter cette expérience à l'avenir.

Quels sont les autres domaines d'interaction avec l'OTCS ?

Après avoir signé un protocole d'intention en 2009, les deux organisations ont élaboré un plan d'action qui comprend diverses activités (par exemple, séances d'information, réunions communes, et formation). Nos relations se sont considérablement développées au cours des deux dernières années. En 2011, le CICR a présenté un exposé lors d'une séance ordinaire du Conseil permanent de l’OTCS en présence de représentants des États membres de l'OTCS. Des représentants de haut niveau de l’OTCS, dont un secrétaire général adjoint de l’OTCS, ont été invités au siège du CICR à Genève pour une série de séances d'information et de rencontres avec les instances dirigeantes du CICR. En novembre 2011, le secrétariat de l'OTCS et la délégation régionale du CICR à Moscou ont organisé conjointement une table ronde sur les problèmes humanitaires et le cadre juridique régissant l'usage de la force. Le directeur général du CICR s'est rendu dans la capitale russe pour assister à l'événement et rencontrer le secrétaire général de l'OTCS. Nous sommes en contact régulier avec les représentants de l’OTCS pour discuter des questions humanitaires et échanger des points de vue. Nous sommes très satisfaits de la qualité de nos relations avec cette importante organisation régionale et espérons qu'ils se développeront davantage.

Le CICR interagit-il avec d'autres organisations de ce type ?

Le CICR a également développé ses relations avec l'Organisation du Traité de l’Atlantique Nord (OTAN). Nous partageons souvent le même théâtre d'opérations, et il est primordial que le mandat, les activités et les procédures de travail du CICR soient bien compris par l'OTAN.

Ces dernières années, le CICR a établi un dialogue constructif avec l'OTAN dans la chaîne de commandement civil et militaire, depuis les quartiers généraux de commandements jusqu'au siège de l'OTAN et d'autres composantes et structures de commandement.

Le CICR véhicule des messages et propose des thèmes pour les cours et les exercices de l'OTAN dans les établissements d'enseignement et de formation de cette organisation, tels le Centre de guerre interarmées à Stavanger, en Norvège, le Centre de formation des forces interarmées à Bydgoszcz, en Pologne, et l'École de l'OTAN à Oberammergau, en Allemagne. Récemment, le CICR a également procédé à des échanges sur l’analyse des résultats et les enseignements tirés du Centre interarmées d'analyse et d'enseignements de l'OTAN à Lisbonne, au Portugal. En outre, le CICR a élargi son dialogue avec l'OTAN sur la base d'un mémorandum d'accord révisé impliquant les deux commandements stratégiques de l'Alliance.

La contribution pratique du CICR aux exercices de postes de commandement et aux exercices sur le terrain est capitale pour pouvoir s’assurer que les militaires se conduisent dans le respect des normes juridiques dans les conditions opérationnelles réalistes simulées dans de tels exercices.

Photos

Laurent Corbaz, chef des opérations du CICR pour l'Europe orientale et l'Asie centrale. 

Laurent Corbaz, chef des opérations du CICR pour l'Europe orientale et l'Asie centrale.
© ICRC

Bishkek, Kirghizistan, septembre 2011. Exercices miltaires de l'OCST. 

Bishkek, Kirghizistan, septembre 2011. Exercices miltaires de l'OCST.
© Reuters / V. Pirogov