Conseil des Délégués

29-02-1996 Article, Revue internationale de la Croix-Rouge, 817

  Genève, 1er et 2 décembre 1995  

  Ouverture de la session  

La session du Conseil des Délégués s'est tenue les 1er et 2 décembre 1995 à Genève en présence de quelque 600 délégués (deux fois plus qu'à Birmingham en 1993) des Sociétés nationales de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, des représentants du CICR et de la Fédération.

La session a été ouverte par le prince Botho zu Sayn-Wittgenstein-Hohenstein, en sa qualité de président de la Commission permanente de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge.

Celui-ci a réaffirmé dans son allocution d'ouverture, la mission première du Mouvement: assister les plus vulnérables. Il a également insisté sur l'importance vitale de la solidarité et de l'harmonie au sein du Mouvement tout en soulignant le droit moral de ce dernier de demander aux Etats de soutenir l'oeuvre de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge. L'assemblée a ensuite procédé à l'élection des représentants officiels du Conseil: M. Cornelio Sommaruga, président du CICR, et le Dr Mohamed El Hadid, président du Croissant-Rouge jordanien, vice-président de la Fédération ont été respectivement élus par acclamation président et vice-président du Conseil des Délégués. Mme Yolande Camporini, de la Fédération, et Kathleen Graf, du CICR, ont été élues aux postes de secrétaires du Conseil.

Dans son allocution, M. Sommaruga a souhaité la bienvenue aux huit nouvelles Sociétés nationales reconnues par le CICR (Andorre, Arménie, Azerbaïdjan, Bélarus, Guinée équatoriale, ex-République yougoslave de Macédoine, Ouzbékistan et Turkménistan) et salué la Croix-Rouge cambodgienne réunie. Il a rappelé le trentième anniversaire des Principes fondamentaux de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge dont beaucoup d'organisations humanitaires s'inspirent de nos jours, en adoptant le Code de conduite que le CICR et la Fédération leur ont proposé. A son tour, il a réitéré la nécessité de préserver la cohésion interne du Mouvement et rappelé à l'assemblée que celui-ci n existe que pour les autres, ses différentes composantes ayant pour mission commune d'aider ceux qui souffrent et qui sont sans ressources. Le monde d'aujourd'hui, a souligné M. Sommaruga, a besoin d'un Mouvement fort et porteur d'un message humanitaire fort.

L'ordre du jour a été adopté à la suite de commentaires relatifs à la XXVIe Conférence internationale, laquelle offre l'occasion de mobiliser la communauté internationale en faveur de toutes les victimes des conflits et autres personnes vulnérables et de souligner le rôle des Sociétés nationales dans la promotion des mesures appropriées dans leurs pays respectifs.

A l'initiative de plusieurs Sociétés nationales, une résolution a été adoptée par acclamation (Résolution 1) engageant «tous les participants à la Conférence internationale, dans l'intérêt de toutes les victimes et de toutes les personnes vulnérables, à sauvegarder le caractère exclusivement humanitaire de la Conférence, notamment en respectant pendant celle-ci les Principes fondamentaux, conformément aux Statuts du Mouvement».

  Rapport de la Commission sur la Croix-Rouge, le Croissant-Rouge et la paix  

M. Maurice Aubert, président de la Commission sur la Croix-Rouge, le Croissant-Rouge et la paix, a présenté le rapport final et les recommandations, les unes de caractère général, les autres sur le respect des droits des enfants, la promotion du manuel de la Fédération «Santé-SIDA-droits de l'homme» et la question des minorités.

M. Eric Roethlisberger, vice-président du CICR, a pour sa part, rappelé la responsabilité du Mouvement dans la promotion de la paix et de la tolérance, et la volonté du CICR de faire étudier la question des transferts d'armes dans un organe restreint et représentatif du Mouvement.

Lady Limerick, vice-présidente de la Fédération, a déclaré que la Fédération estimait que les travaux de la Commission pouvaient être repris par les composantes du Mouvement, confirmant par là la dissolution de la Commission.

Les délégués ont exprimé leur gratitude envers la Commission et son président et adopté une résolution qui, entre autres, «prie les Sociétés nationales, le CICR et la Fédération internationale, en collaboration avec l'Institut Henry-Dunant, de poursuivre la mise en oeuvre du «Programme d'action de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge comme facteur de paix», ainsi que des «Lignes directrices fondamentales pour la contribution du Mouvement de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à une paix véritable dans le monde». De même, la résolution exhorte toutes les composantes du Mouvement à oeuvrer à la prévention des conflits en renforçant la compréhension parmi les peuples et à réaffirmer l'importance de la sauvegarde des droits des enfants - notamment de ceux qui sont exploités, maltraités ou torturés. Elle souligne aussi la nécessité d'adopter des mesures dans le cadre national en vue de réprimer la prostitution enfantine. Enfin le Conseil a souhaité dans cette résolution que le rôle et l'attitude du Mouvement quant au problème des transferts d'armes soient étudiés et précisés.

Dans son commentaire final, M. Aubert a souligné que les droits de l'homme et la prévention des conflits sont à la paix ce que l'hygiène est à la santé. Il a insisté, pour conlure, sur l'importance du réseau mondial des Sociétés nationales dans l'assistance aux plus vulnérables (Résolution 2).

  Avenir du Mouvement  

Par une résolution adoptée lors de sa session de Birmingham en 1993, le Conseil des Délégués avait créé une «Commission consultative d'orientation et de prospective» composée de 12 membres choisis parmi les Sociétés nationales (6), la Fédération (3) et le CICR (3) et l'avait chargée de mener une étude sur l'avenir du Mouvement. Par la voix de son président, M. Darrell Jones, de la Croix-Rouge canadienne, cette Commission a présenté son rapport au Conseil des Délégués, mentionnant en particulier le rôle renforcé que la Commission consultative propose de donner à la Commission permanente, les perspectives de la coopération fonctionnelle entre les différentes composantes du Mouvement et les questions relatives à l'emblème (à propos desquelles la Commission propose que la Commission permanente consulte des experts gouvernementaux sur tous les aspects relatifs à l'utilisation de l'emblème).

Le Conseil des Délégués a dans son ensemble accueilli très favorablement les conclusions de ce rapport et adopté une résolution relative au mandat renforcé et à la structure de la Commission permanente. Il a dans cette même résolution décidé de rétablir sur une base temporaire une Commission consultative indépendante de 12 membres (dont 3 nommés par le CICR, 3 par la Fédération et 6 émanant de Sociétés nationales). Cette Commission est chargée d'assurer le suivi des recommandations relatives à la Commission permanente et au Conseil des Délégués, de relever les domaines pouvant nécessiter des clarifications dans les dispositions statutaires concernant le rôle, les compétences et le fonctionnement des organes statutaires du Mouvement, de suivre les développements dans le domaine de la coopération fonctionnelle entre le CICR et la Fédération, de faire des propositions pour une stratégie commune des composantes du Mouvement et de suivre l'évolution des facteurs extérieurs touchant le Mouvement (Résolution 3).

En outre, le Conseil des Délégués a adopté une résolution invitant le CICR et la Fédération à poursuivre le développement de leur coopération fonctionnelle et «en se fondant sur l'expérience pratique et sur le rapport relatif à leur coopération fonctionnelle, (d'élaborer des propositions qui seront prises en compte dans le nouvel accord devant définir l'organisation des activités internationales des composantes du Mouvement» (Résolution 4).

  Politique d'information du Mouvement  

Les responsables de l'information au CICR et à la Fédération, MM. Christian Kornevall et Ian Piper, ont évoqué les grandes lignes directrices de la politique d'information du Mouvement qui, approuvées en 1989, appelaient à une réactualisation. Ils ont présenté les priorités du plan de travail auxquelles le CICR et la Fédération entendent consacrer tous leurs efforts au cours des prochaines années, priorités qui prennent en compte le domaine des publications, la commémoration annuelle de la Journée mondiale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, les nouvelles techniques de la communication, les relations du Mouvement avec les médias, etc. Ils ont sollicité l'attention des délégués sur la nécessité d'obtenir le soutien des Sociétés nationales et d'élargir leur participation pour des projets concernant les questions d'information.

A l'issue du débat, le Conseil des Délégués a approuvé une résolut ion qui, entre autres, «invite le CICR et la Fédération internationale à collaborer judicieusement avec toutes les Sociétés nationales pour transmettre au monde entier des messages clairs et concis inspirés des Principes fondamentaux de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge...». En outre, le CICR et la Fédération sont invités «à convoquer une Assemblée géographiquement représentative de spécialistes de la communication des Sociétés nationales et, si nécessaire, avec le concours de consultants extérieurs, pour établir un ensemble de plans cohérents à exécuter entre 1996 et l'an 2000». Cette assemblée pourrait aussi en 1996 se pencher sur la question de l'information aux Sociétés nationales quant aux contacts directs que le CICR et la Fédération prennent avec les agences de presse dans le cadre de campagnes ou d'appels (Résolution 6).

  Les enfants dans les conflits armés  

Le Conseil des Délégués a approuvé une résolution qui, déplorant le fait que des enfants de moins de 15 ans soient utilisés comme soldats dans de nombreuses régions du monde, en violation du droit international, «prie instamment le CICR, les Sociétés nationales et la Fédération internationale de tout mettre en oeuvre pour une application plus rigoureuse des règles internationales existantes et de les diffuser plus largement». Entérinant le Plan d'action sur le rôle du Mouvement visant à promouvoir le principe de non-participation et de non-recrutement des enfants de moins de 18 ans dans les conflits armés et à prendre des mesures concrètes pour protéger et assister les enfants victimes de conflits armés, le Conseil a prié le CICR et la Fédération de faire rapport sur l'état d'avancement du plan d'action au Conseil des Délégués en 1997 (Résolution 5).

  Institut Henry-Dunant  

Après avoir entendu les rapports du président de l'Assemblée de l'Institut, M. George Weber et de son directeur a. i., M. Jiri Toman, le Conseil a tenu à saluer les trente années d'activité de l'Institut et les services qu'il a rendus dans les domaines de la recherche, de la formation et des publications. Les délégués ont adopté une résolution par laquelle le Conseil, tout en prenant note que le CICR, la Fédération et de nombreuses Sociétés nationales ont mis sur pied leurs propres systèmes d'information, de recherche et de formation, invite le CICR, la Fédération et la Croix-Rouge suisse, en leur qualité d'organes cofondateurs de l'Institut, à examiner et redéfinir - avant la fin de 1996 - le rôle et les fonctions de l'Institut afin que ses ressources intellectuelles, financières et matérielles soient affectées à des activités qui contribuent à préciser et à éclairer les politiques et stratégies communes du Mouvement. De plus, le Conseil invite les Sociétés nationales à donner leur plein appui à la redéfinition et au renforcement de l'Institut et enfin prie les institutions cofondatrices de rendre compte des progrès accomplis au Conseil des Délégués en 1997 (Résolution 8).

  Rapport de la Commission pour le financement du CICR  

Le Conseil des Délégués a renouvelé pour deux ans le mandat de cette Commission, qui avait été fondée à l'initiative de cinq Sociétés nationales. Ainsi, il a confirmé dans leur mandat les Sociétés nationales d'Allemagne, d'Australie, de Colombie, du Costa Rica, de Finlande, de la Libye, du Japon, et de la Sierra Leone, désignant comme nouveaux membres les Sociétés nationales de la République de Corée, de Hongrie, du Liban et du Zimbabwe.

Le Conseil des Délégués a aussi prié la Commission, actuellement présidée par M. Markku Niskala (Finlande), de réévaluer son rôle et son mode de fonctionnement et d'en déterminer les modalités les plus adéquates, d'entente avec le CICR (Résolution 7).

  Protection armée de l'aide humanitaire  

Le Conseil des Délégués a approuvé une résolution prenant note du rapport présenté par le CICR et par la Fédération, rappelant le principe fondamental selon lequel les composantes du Mouvement n'ont pas recours à la protection armée et entérinant les principes directeurs énoncés dans le rapport (humanité, indépendance, impartialité, neutralité), en particulier les critères minimaux de recours exceptionnel à la protection armée de convois humanitaires (Résolution 9).

  Mines terrestres antipersonnel  

A la suite d'un débat très animé, le Conseil des Délégués a adopté une résolution par laquelle, exprimant sa vive préoccupation devant les effets indiscriminés des mines terrestres antipersonnel et leurs effets sur les populations civiles et sur l'action humanitaire, il demande instamment à toutes les composantes du Mouvement d'oeuvrer en faveur de l'interdiction totale des mines terrestres antipersonnel, appuie toutes les mesures destinées à alléger les souffrances des victimes et à enlever les mines déjà en place, invite les Sociétés nationales à renforcer leurs démarches auprès de leurs gouvernements afin d'obtenir l'interdiction totale des mines terrestres antipersonnel et prie le CICR et la Fédération de faire rapport en 1997 sur les progrès accomplis.

  Autres points  

Le CICR et la Fédération ont rendu compte de la diffusion et de l'application du Code de conduite pour les organisations intervenant lors des opérations de secours en cas de catastrophe au sein du Mouvement et des ONG ainsi que de la question des réfugiés et personnes déplacées. Ces deux thèmes ont été repris dans les travaux de la XXVIe Conférence internationale et ont fait l'objet de résolutions (voir supra, pp. 124-125).

  Date et lieu de la prochaine session du Conseil des délégués  

Le Conseil des Délégués a pris note de l'invitation de la Croix-Rouge espagnole de tenir la prochaine session du Conseil des Délégués à l'automne 1997.

  Cérémonie de remise de la Médaille Henry Dunant  

 

Au cours d une cérémonie qui s'est déroulée à Genève le 2 décembre 1995, six personnes, dont trois à titre posthume, ont été décorées de la Médaille Henry Dunant pour les services humanitaires qu'elles ont rendus.

Les lauréats sont les suivants:

 

* Dr Hugo Ernesto Merino Grijalva, ancien président de la Croix-Rouge équatorienne;

* Mme Jacqueline Briot, de la Croix-Rouge française;

* Prince Botho zu Sayn-Wittgenstein-Hohenstein, président de la Commission permanente de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge;

* Tunku Tan Sri Mohammed, ancien président du Croissant-Rouge de Mala isie (à titre posthume);

* Professeur Hans Haug, ancien président de la Croix-Rouge suisse, ancien vice-président de la Fédération internationale et membre du Comité international de la Croix-Rouge;

* Dr Esmildo Gutierrez Sanchez, ancien secrétaire général de la Croix-Rouge cubaine (à titre posthume).

 

Rappelons que ces médailles sont attribuées tous les deux ans en reconnaissance de services et d'actes exceptionnels, accomplis au nom du Mouvement. Parmi les critères à remplir figurent les risques encourus pour d'autres personnes, qui mettent en péril la vie, la santé et la liberté individuelle. Ces médailles peuvent aussi être décernées en reconnaissance d'une longue période de service consacrée au Mouvement.

 

Depuis 1969, 61 membres du Mouvement ont été décorés de la Médaille Henry Dunant, dont 16 à titre posthume.