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Au secours des civils touchés par la guerre – être ambulancier à Sderot

24-09-2009 Éclairage

Avraham est un ambulancier du Magen David Adom à Sderot, ville israélienne proche de la bande de Gaza. Il transporte notamment des Palestiniens gravement malades qui ne peuvent être soignés à Gaza. Selon lui, espérer ne suffit pas ; il faut agir, car c’est ce qui donne du sens à la vie.

     
    ©Magen David Adom      
   
Avraham Tiger      
       
       
    ©ICRC /A. Gutman / il-e-00442      
   
Sderot, mai 2007. Des ambulances du Magen David Adom évacuent les victimes d'un bombardement.      
           

Avraham Tiger est chef des secouristes dans une centrale d’ambulances du Magen David Adom (l’équivalent israélien d’une Société nationale de la Croix-Rouge ou du Croissant-Rouge) à Sderot, une ville d’environ 30 000 habitants située à quelques kilomètres à peine de la bande de Gaza. Pendant plusieurs années, la population de cette ville a subi des tirs de roquettes presque quotidiens. L’hiver passé, lors de la crise de Gaza, il est parfois arrivé que jusqu'à 80 roquettes frappent la ville en une seule journée. Les sirènes retentissaient à toute heure du jour et de la nuit, incitant les habitants à se réfugier dans les nombreux abris contre les bombardements, que l’on trouve même aux arrêts de bus. Depuis, la situation s’est beaucoup calmée, mais les tirs de roquettes provenant de la bande de Gaza n’ont pas complètement cessé.

Depuis neuf ans qu’il fait ce métier, Avraham Tiger a été confronté à toutes les situations imaginables et a été témoin des horribles souffrances que la guerre peut infliger aux civils. « L’une de mes pires expériences a été lorsque nous avons été appelés sur un lieu qui venait juste d’être frappé par des obus de mortier, explique Avraham. Il s’est trouvé que la personne touchée était l’un de mes amis. Je n’ai rien pu faire pour lui, il était mort sur le coup. »

Ce qui inquiète particulièrement Avraham, c’est la manière dont les enfants – et pas seulement les siens – peuvent surmonter le stress et les traumatismes causés par la guerre. « Il y a beaucoup de violence dans cette ville et la situation tendue fait que certains enfants manquent l’école. Nombre d’entre eux pensent que leurs parents ne peuvent pas les protéger. La peur est palpable. Mes propres enfants dorment tou jours sur des matelas dans la pièce que je considère comme la plus sûre de la maison. Ils préfèrent dormir là, même si tout est très calme maintenant – et c'est ce que je préfère moi aussi. » Un jour, une roquette s’est abattue près du porche de la maison d’Avraham. Avec ses quatre enfants, il a planté un bougainvillier à l'endroit de l'impact. « Je m’efforce de donner à mes enfants un sentiment de sécurité. Je veux qu’ils aient l’impression d’avoir une vie normale. » 

Maintenant que le nombre d’attaques a diminué, le travail des ambulanciers est redevenu plus routinier, avec les interventions habituelles en cas d’accidents de la route, de crises cardiaques et autres. Il y a toutefois une tâche particulière qu’Avraham continue d’effectuer chaque fois qu'il le faut : aller chercher dans la bande de Gaza les patients gravement malades nécessitant des soins spécialisés qui ne sont pas dispensés dans le petit territoire palestinien. « Nous intervenons souvent dans le transfert de nouveau-nés, d'enfants atteints d’un cancer ou de patients aux soins intensifs sur des hôpitaux situés à l’extérieur de la bande de Gaza. Pour moi, c’est un travail comme les autres », précise Avraham. Ces missions dites « relais », au cours desquelles les ambulanciers palestiniens de Gaza coopèrent avec leurs homologues israéliens, sont nécessaires car les ambulances provenant de la bande de Gaza ne sont pas autorisées à pénétrer sur sol israélien. Les patients sont ainsi transférés d’une ambulance à une autre au point de passage d’Erez. 

Se préparer à une éventuelle nouvelle escalade du conflit fait aussi partie du travail d’Avraham. Le Magen David Adom fournit des trousses de premiers secours et dispense une formation aux maîtres dans les écoles et les jardins d’enfants, ainsi qu’à d’autres personnes dans divers quartiers. « Pour sauver des vies, il est essentiel de savoir stopper le saignement en cas de blessure causée par un éclat d’obus ou lorsqu’un membr e a été arraché, explique encore le secouriste. Les six ou sept premières minutes sont vraiment cruciales, et c’est le temps qu’il nous faut pour nous rendre sur place avec une ambulance. »

« Je vois l’avenir avec optimisme, mais " optimisme " n’est qu’un mot, poursuit-il. Se contenter de souhaiter la paix et d’espérer des temps meilleurs ne suffit pas ; au contraire, je pense qu’il faut agir concrètement pour aider les autres. J’ai besoin que ma vie ait du sens, de faire quelque chose qui aille au-delà de ma propre personne, et le travail que je fais ici dans ces conditions dangereuses me permet de répondre à ce besoin. »