Les déplacés au Kenya : atteindre les personnes en détresse

11-01-2008 Interview

Les violences qui ont éclaté suite aux élections ont contraint plus de 250 000 personnes à fuir leur foyer. Pascal Cuttat, chef de la délégation du CICR à Nairobi, dit qu’actuellement, les principaux objectifs et défis consistent à répondre aux besoins des personnes déplacées dans la vallée du Rift et dans l’ouest du Kenya, un défi qui est en grande partie relevé en collaboration avec la Croix-Rouge du Kenya.

     

    ©CICR      
   
    Pascal Cuttat      
          Comment décririez-vous la situation humanitaire actuelle au Kenya ?  

     

Une première série d’évaluations professionnelles est en cours sur le terrain dans tout le pays. Ces évaluations sont terminées dans l’ouest du Kenya, où se trouvent quelque 51 000 pe rsonnes déplacées. En termes de chiffres, la situation dans la vallée du Rift est beaucoup plus floue car les personnes sont en déplacement. Des villes comme Eldoret, Burnt Forest et Cherengani comptent une grande concentration de personnes déplacées, mais beaucoup d’autres personnes ont quitté la vallée du Rift pour retourner vers leurs terres ancestrales où nombre d’entre elles sont hébergées par des proches.

  Quelles sont les priorités du CICR dans cette situation ?  

     

Les besoins les plus urgents sont ceux des personnes qui restent dans les camps de la vallée du Rift et de l’ouest du Kenya, notamment l’eau, les abris, les vivres et les soins de santé. Dans tout le pays, les hôpitaux ont également des besoins urgents, comme les interventions chirurgicales et l’identification de centaines de corps qui n’ont pas été réclamés. Il est nécessaire pouvoir identifier les dépouilles mortelles de façon adéquate avant l’enterrement, afin que les familles puissent finalement apprendre ce qui s’est passé si l’un de leurs proches figure parmi les disparus. Nous devrons en outre assister les centaines de familles qui ont été dispersées par les événements, notamment les enfants qui ont été séparés de leurs parents. Ces deux éléments constituent une part importante du travail du CICR et de son rôle particulier en matière de protection de la population.

  L’assistance humanitaire parvient-elle aux personnes en détresse, en particulier dans les régions qui ont connu les plus fortes violences ?  

     

Pour le CICR et la Croix-Rouge du Kenya, l’accès n’est pas un problème. La sécurité dans le pays est satisfaisante et le CICR et la Société nationale se déplacent dans les régions touchées depuis maintenant plus d’une semaine. La Croix-Rouge jouit d’un profond respect dans ce pays, bien que les employés aient rencontré quelques problèmes au début, la population leur demandant quelle était leur affiliation tribale. Ce problème a été surmonté et nous pouvons aller partout où nous sommes nécessaires. Nos systèmes logistiques tournent à plein régime. Nous fournissons des vivres, des articles de ménage essentiels, des équipements d’approvisionnement en eau et d’assainissement et des fournitures médicales, et mettons à disposition une équipe chirurgicale du CICR. Toute cette assistance parvient aux personnes qui en ont besoin dans la vallée du Rift et l’ouest du Kenya. Dans les bidonvilles de Nairobi et d’autres villes, les habitants ne peuvent plus travailler depuis des semaines et commencent à avoir faim. La Croix-Rouge du Kenya répond à ce besoin en distribuant des vivres.

  À votre avis, comment la situation va-t-elle évoluer dans les jours et les semaines à venir ?  

Cela dépendra beaucoup de l’évolution politique. Nous espérons que le processus politique mènera à une stabilisation de la situation. Mais quelle que soit l’évolution, il faudra encore résoudre le problème du retour des personnes déplacées. Une assistance sera nécessaire pour ceux qui peuvent rentrer là où ils vivaient et pour ceux qui ne le peuvent pas. Il faudra notamment reconstruire des maisons et d’autres bâtiments. Il faudra également des semences et des outils pour ceux qui retournent dans leur ferme. Nombre de ces personnes auront besoin d’une assistance alimentaire pendant ces prochains mois. Des efforts seront en outre requis pour assurer le regroupement des familles qui ont été dispersées, ou au moins pour leur permettre de connaître le sort de leurs proches disparus.