Armes à sous-munitions : de quoi s’agit-il, et quel est le problème ?

01-08-2010

Pourquoi les armes à sous-munitions suscitent-elles tant de préoccupations sur le plan humanitaire ? Combien de pays produisent et stockent des armes à sous-munitions ? Combien de pays ont employé des armes à sous-munitions ? Des mécanismes d’autodestruction et autres améliorations techniques peuvent-ils résoudre le problème des armes à sous-munitions ?

     

©AP M. Zaatari      
   
     

       

Les armes à sous-munitions constituent un problème persistant depuis plusieurs décennies. Les effets exercés par ces armes sur une vaste zone et le grand nombre de sous-munitions qui n’explosent pas comme prévu ont causé un grand nombre de pertes civiles. Bien que seul un nombre limité de pays ait réellement employé des armes à sous-munitions, de nombreux pays détiennent de telles armes dans leurs arsenaux. Même si une fraction seulement des armes à sous-munitions existant aujourd’hui dans les s tocks devait être employée ou transférée vers d’autres pays ou vers des groupes armés non étatiques, les conséquences risqueraient d’être bien plus lourdes que dans le cas des mines antipersonnel. Les améliorations techniques apportées aux armes à sous-munitions n’ont pas, à ce jour, fourni de solution adéquate et un nombre toujours plus élevé d’États adhèrent à la Convention sur les armes à sous-munitions pour résoudre de manière satisfaisante les problèmes humanitaires causés par ces armes.

 

  Armes à sous-munitions : de quoi s’agit-il ?  

  • Les armes à sous-munitions consistent en un conteneur qui s’ouvre en l’air et répand sur une vaste zone une grande quantité de sous-munitions explosives (appelées aussi « bombettes » ou, parfois, « bomblets »). Ces sous-munitions – dont le nombre peut varier selon le modèle, allant de quelques dizaines à plus de 600 – peuvent être larguées par des aéronefs (avions, hélicoptères) ou lancées au moyen de pièces d’artillerie ou de missiles.

  • La plupart des sous-munitions sont censées exploser à l’impact. La vaste majorité d’entre elles tombent en chute libre, ce qui signifie qu’elles ne sont pas guidées individuellement pour atteindre une cible donnée.

  • Les armes à sous-munitions ont été employées pour la première fois pendant la Seconde Guerre mondiale et, de fait, un fort pourcentage d’armes à sous-munitions qui se trouvent aujourd’hui dans les stocks ont été conçues pour le contexte de la guerre froide. Leur but principal était de détruire de multiples cibles militaires dispersées sur une vaste zone (des formations de chars ou d’infanterie, par exemple), et pour tuer ou blesser des combattants.

  Pourquoi les armes à sous-munitions suscitent-elles tant de préoccupations sur le plan humanitaire ?  

  • L’histoire a montré qu’un grand nombre de sous-munitions n’explosent pas comme prévu au moment de l’impact. Les estimations crédibles du taux de non-fonctionnement de ces armes lors de conflits récents varient, allant de 10 % à 40 %. L’emploi de ces armes à grande échelle a pour conséquence que certains pays et régions sont infestés de dizaines de milliers, et parfois de millions, de sous-munitions non encore explosées et très instables.

  • Les sous-munitions non éclatées explosent souvent quand elles sont manipulées ou bougées, constituant un grave danger pour les civils. La présence de ces armes représente une menace pour les civils déplacés qui regagnent leurs foyers et, de surcroît, elle entrave les actions de secours et les efforts de reconstruction. Des activités de subsistance d’importance vitale (travaux des champs, par exemple) restent en outre dangereuses pendant des années, voire des décennies, après la fin du conflit.

  • Parce que ce sont des « armes à grande surface d’action », capables de larguer un très grand nombre de sous-munitions sur une zone pouvant atteindre des dizaines de milliers de mètres carrés, les effets des armes à sous-munitions sur les civils pendant les conflits suscitent aussi de graves préoccupations, en particulier quand ces armes sont employées dans des zones habitées.

  • Comme la plupart des sous-munitions ne sont pas guidées, leur précision peut être affectée par les conditions météorologiques ou autres facteurs environnementaux. Il est donc possible qu’elles frappent des zones situées en dehors de l’objectif militaire visé. Quand de telles armes sont employées à l’intérieur ou à proximité de zones habitées, elles peuvent représenter un grave danger pour les civils, pendant l’attaque et pendant la période qui suit immédiatement la frappe, au moment où la population reprend ses activités normales .

  Combien de pays produisent et stockent des armes à sous-munitions ?  

  • Au total, 34 pays auraient produit plus de 210 différents types d’armes à sous-munitions, parmi lesquelles figurent des projectiles, des bombes, des roquettes, des missiles et des conteneurs (Hiznay).

  • Au moins 87 pays détiennent aujourd’hui des stocks d’armes à sous-munitions ou en ont détenu par le passé (HRW, Information Chart). À l’heure actuelle, les arsenaux recèlent des millions de ces armes, contenant des milliards de sous-munitions individuelles.

  • Au moins quatre pays qui produisaient auparavant des armes à sous-munitions ont adopté de nouvelles politiques ou législations nationales aux termes desquelles ils s’engagent à ne plus en produire du tout (HRW, Information Chart ; Human Rights Watch). Cela montre que l’accent mis récemment sur les conséquences de ces armes sur le plan humanitaire a d’ores et déjà provoqué certains changements positifs au niveau national.

  Combien de pays ont employé des armes à sous-munitions ?  

  • Sur les 87 pays qui détiennent ou ont détenu des stocks d’armes à sous-munitions, 16 en ont réellement employé au cours d’un conflit armé (HRW, Information Chart, Cluster Munition Coalition).

  • L’emploi de telles armes par des groupes armés non étatiques a été documenté dans un petit nombre de cas (HRW, Overview).

  • Même si une fraction seulement des armes à sous-munitions existant aujourd’hui dans les stocks devait être employée ou transférée vers d’autres pays ou vers des groupes armés non étatiques, les conséquences risqueraient d’être bien plus lourdes que dans le cas des mines antipersonnel employées dans les années 1990.

  Des mécanismes d’autodestruction et autres améliorations techniques peuvent-ils résoudre le problème des armes à sous-munitions ?  

  • La majorité des armes à sous-munitions stockées actuellement sont d’anciens modèles (datant de 20 ans ou plus). Ces engins deviennent de moins en moins fiables et ne devraient pas être employés.

  • Des modèles plus récents sont munis d’un mécanisme d’autodestruction : ainsi, les sous-munitions sont censées se détruire automatiquement si elles n’explosent pas comme prévu. Cependant, cette technologie n’a pas fourni de solution satisfaisante au problème de la fiabilité. Certes, lors de tests, le mécanisme d’autodestruction a permis de réduire le nombre de sous-munitions non encore explosées mais dans les conditions de combat, le taux réel de non-fonctionnement reste élevé. Même dotées de tels mécanismes, il est arrivé que ces armes laissent un nombre élevé de sous-munitions non explosées sur le sol.

  • Heureusement, un grand nombre d’États ont adhéré ou sont sur le point d’adhérer à la Convention sur les armes à sous-munitions. Cette Convention a été négociée et adoptée par 107 États lors d’une conférence diplomatique tenue à Dublin (Irlande) en mai 2008. La Convention établit des nouvelles règles visant à garantir que les armes à sous-munitions ne seront plus employées et que les problèmes humanitaires aujourd’hui associés à ces armes seront résolus (voir le document d’information sur la Convention sur les armes à sous-munitions : un nouveau traité visant à mettre un terme aux souffrances provoquées par ces armes ).
   

Sources:

Mark Hiznay, Survey of cluster munitions produced and stockpiled, présentation lors de la réunion d’ex perts organisée par le CICR sur les questions d’ordre humanitaire, militaire, technique et juridique relatives aux armes à sous-munitions, Montreux, Suisse, 18-20 avril 2007.

H uman Rights Watch, Cluster Munition Information Chart , April 2010, , (HRW, Information Chart) 

Human Rights Watch , At a Glance: Global Overview of Cluster Munition Policy and Practice, Human Rights Watch, Washington D.C., USA, October 2007 (HRW, Overview).

C luster Munition Coalition, The problem      
   
       
        pdf     Victimes des armes à dispersion      (454 Ko)    
    
 

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