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La Chine et le CICR mettent sur pied un premier centre orthopédique

19-03-2004 Éclairage

Quelque 200 000 mines seraient éparpillées le long de la frontière chinoise avoisinant le Vietnam, restes d'un conflit qui remonte à vingt-cinq ans. Le centre est le fruit d'une collaboration entre le CICR et la Croix-Rouge chinoise et permet de venir en aide aux victimes de ces nombreux accidents. Un reportage de Roland Sidler.

Le 2 décembre 2003, le CICR et la Croix-Rouge chinoise ont inauguré le centre d’appareillage orthopédique de Kunming. Situé dans la capitale de la province du Yunnan, le centre est installé au cinquième étage d'un foyer pour retraités appartenant à la Croix-Rouge. Il dispose de nouvelles machines et de tout l'équipement nécessaire à la production de membres artificiels selon des méthodes performantes de fabrication.

 
Pan De Peng à l'hôpital, décembre 2003© CICR Roland Sidler/réf. cn-e-00008 
 

L’accord de coopération en matière orthopédique - le premier du genre entre le CICR et la Chine - s’inscrit dans le cadre d’un programme d'une durée de cinq ans. L'une des tâches du CICR sera de former le personnel local qui pourra gérer le centre par la suite.
 
La guerre frontalière qui a opposé la Chine au Vietnam en 1979 n'a duré que quelques mois, mais elle a fait des centaines de milliers de déplacés dans les régions du sud du Yunnan. Les tensions entre les deux pays ne s’étant véritablement résorbées qu'en 1988, la plupart des civils n’ont regagné leurs villages d’origine que dix ans plus tôt.
 
  Plus de 6 000 victimes  

Une agriculture en terrasses est pratiquée dans cette zone aux paysages escarpés où la feuille de tabac est l'une des principales ressources. Sur les sols pentus, les récoltes ne peuvent pas être faites à l'aide d'engins mécanisés. L'homme, le mulet et le buffle doivent donc conjuguer leurs efforts pour faire fructifier les lopins de terre.
 
Selon certaines statistiques, quelque 200 000 mines seraient encore éparpillées dans cette région et plus de 6 000 civils auraient subi l'amputation d'un membre après avoir heurté un engin explosif.

Dû à la précarité des moyens de transport vers un centre de réhabilitation avoisinant, ou simplement par manque de moyens financiers, de nombreux amputés ne sont pas appareillés, ou ont une prothèse qui n’a pas résisté aux contraintes imposées par le travail quotidien dans les champs.

Il y a quelques jours seulement, Pan De Peng a perdu la moitié de sa jambe droite. Ce paysan de 56 ans était parti couper de l'herbe avec un voisin. Les deux hommes s'étaient quelque peu éloignés l'un de l'autre pour trouver le meilleur fourrage, lorsque Peng a sauté sur une mine. Il avait déjà perdu beaucoup de sang lorsque son compagnon l’a retrouvé après l’avoir cherché un bon moment.

 
Chen Zheng Fang avec le technicien orthopédique du CICR© ICRC Roland Sidler/réf. cn-e-00007 
 

Peng a été transporté le plus rapidement possible à l'hôpital de Malipu, à plus d'une heure de voiture de chez lui. Dès que sa plaie sera cicatrisée, il pourra se rendre au centre d’appareillage orthopédique du CICR, où il sera nourri et logé jusqu'à ce qu'il puisse retrouver suffisamment de mobilité avec sa jambe artificielle en polypropylène pour reprendre son travail.

  Victime des mines à deux reprises  

Chen Zheng Fang, quant à lui, vit dans le minuscule village de Bali He, non loin de chez Peng. Cet autre paysan de 46 ans reste une bonne partie de la journée assis sur son tabouret. Il a connu les mêmes déboires que Peng : il a été amputé d’une jambe après avoir marché sur une mine.

Déjà en 1992, il avait perdu un œil à cause d’un éclat provenant de l'explosion d'une mine. Au mois de mai 2003, c'est un nouvel accident, plus grave encore, qui a définitivement bouleversé sa vie. Il n'a pas d'argent pour acheter une prothèse et ne peut plus travailler dans les champs. Aujourd'hui, sa femme et ses trois jeunes enfants se chargent de toute la besogne. Fang se réjouit, lui aussi, de l'ouverture du centre de réhabilitation de Kunming. Déjà, il sait que sa vie va changer.