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Sierra Leone : le CICR blanchi des allégations de livraisons d'armes

01-09-2005 Interview

Rendu public le 8 août 2005, le rapport final de la Commission vérité et réconciliation blanchit formellement le CICR des allégations, selon lesquelles il aurait utilisé un de ses hélicoptères pour apporter son soutien au Front uni révolutionnaire (RUF) à l’époque du conflit. Jürg Montani, chef de la délégation du CICR en Sierra Leone, répond à un certain nombre de questions.

  Nous imaginons que vous vous vous félicitez des conclusions de la Commission vérité et réconciliation ?  

Effectivement. La Commission confirme les résultats de l’enquête qu’avait menée le gouvernement de la Sierra Leone qui, en avril 1999 déjà, avait lavé le CICR de tout soupçon. Ces rumeurs et ces allégations avaient néanmoins longtemps persisté. Le rapport de la Commission apporte enfin une preuve tangible et indépendante du fait que le CICR n’était mêlé à aucun type d’activités illégales et qu’il est toujours resté fidèle au principe de neutralité qui est le sien. Le CICR a fourni à la Commission suffisamment de preuves pour lui permettre d’établir que l’hélicoptère soupçonné d’être impliqué dans un trafic d’armes n’était pas un appareil du CICR.

     

  Comment ces accusations se sont-elles fait jour ?  

En 1998, plusieurs témoins ont vu un hélicoptère portant l’emblème de la croix rouge voler en direction de la zone contrôlée par le RUF (région de Makeni). Ces personnes ont prétendu que l’appareil servait à fournir des armes, des munitions et du matériel divers aux rebelles du RUF. Cet hélicoptère n’était cependant pas celui que le CICR utilisait pour distribuer l’aide humanitaire à la population civile touchée par le conflit. Tous les vols du CICR étaient soumis à une autorisation et un à un contrôle des autorités, et il a été prouvé que l’hélicoptère aperçu par les témoins n’appartenait pas au CICR. L’appareil repéré dans la région de Makeni n’était pas là à des fins humanitaires. Il s’agissait donc d’un usage abusif de l’emblème de la croix rouge.

     

  Pourquoi le CICR a-t-il utilisé des hélicoptères pendant le conflit en Sierra Leone ?  

Le CICR est actif dans le pays depuis 1990. Pendant les années de guerre, il est venu en aide aux victimes dans toutes les régions touchées par le conflit. Il a utilisé des hélicoptères pour atteindre les zones inaccessibles par la route, transportant du matériel destiné à des opérations de secours exclusivement – des fournitures médicales en particulier. Il a toujours agi selon les modalités qu’il applique dans le monde entier, donc avec l’autorisation expresse de toutes les parties concernées. Dans un premier temps, il a mené des activités dans des régions contrôlées par le gouvernement. Puis, dès 1996, il a également porté assistance aux civils vivant dans des zones aux mains du RUF. Tous les vols étaient notifiés en bonne et due forme et les chargements inspectés par les autorités.

     

  Quelles conséquences l’abus de l’emblème entraîne-t-il ?  

L’emblème de la croix rouge est souvent la seule protection dont jouit le personnel de la Croix-Rouge, même en période de conflit. Tous les combattants devraient comprendre, sans en douter, que les personnes arborant cet emblème ne sont là qu’à des fins humanitaires, et doivent par conséquent être non seulement protégées contre toute attaque, mais aussi soutenues dans l’exercice de leur mission. En cas d’abus de l’emblème par les parties à un conflit, les véritables travailleurs humanitaires perdent la confiance des combattants et encourent donc des risques majeurs pour leur vie. Sans compter les e ntraves que de tels agissements peuvent représenter pour les opérations d’aide humanitaire et, à terme, l’impossibilité de fournir aux victimes des conflits l’assistance vitale dont elles ont besoin. C’est la raison pour laquelle le droit international accorde une protection spéciale aux emblèmes de la croix rouge et du croissant rouge. 

     

  Comment peut-on empêcher l’abus de l’emblème ?  

Les Conventions de Genève obligent les États à adopter une législation nationale spécifique afin d’éviter tout risque d’usage abusif. Chaque État devra adopter un certain nombre de mesures qui permettent d’identifier l’emblème, désigner une autorité nationale compétente pour en réglementer l’emploi et dresser une liste des entités habilitées à l’utiliser. En outre, l’État doit adopter une législation nationale interdisant et sanctionnant l’usage non autorisé de l’emblème – par exemple sur un véhicule servant à transporter des troupes ou des armes pendant un conflit, ce qui peut être assimilé à la perfidie, qui est un crime de guerre.

     

  Que fait le CICR pour protéger l’emblème des usages abusifs ?  

Tout ce que nous pouvons faire est rappeler à toutes les parties à un conflit l’importance de respecter l’emblème et les en convaincre. Pour notre part, en tant qu’organisation humanitaire utilisant l’emblème de la croix rouge, il nous incombe de veiller à ce que nos collaborateurs respectent les principes de neutralité et d’impartialité de façon à conserver notre crédibilité auprès de toutes les parties à un conflit. En matière d’intégrité et de responsabilité, nos collaborateurs sont soumis à un niveau à un niveau d’exigence tr ès élevé et très strict.