Bangladesh : des familles plongées dans une attente interminable

24-04-2014 Éclairage

Le 24 avril marque le premier anniversaire de l’effondrement d’un immeuble de huit étages dans la banlieue industrielle de Dacca, dans lequel plus de 3 000 personnes travaillaient dans des usines et des commerces. Aujourd’hui encore, des familles attendent de savoir ce qu’il est advenu de leurs proches.

Mehera Begum, la mère de Babu, tient le formulaire accompagnant l’échantillon d’ADN de son fils. 

Mehera Begum, la mère de Babu, tient le formulaire accompagnant l’échantillon d’ADN de son fils.
© CICR / R. Sultana Toma

« Où est mon fils ? »

Mehera Begum fait une dernière vérification : formulaire relatif à l’échantillon d’ADN, autres documents, tout y est. Rangeant soigneusement les documents dans une pochette en plastique, elle se dirige vers le Rana Plaza, comme chaque jour depuis que l’immeuble s’est effondré il y a un an. Chaque jour, sans exception, cette femme s’est rendue au Rana Plaza, où elle a perdu son fils Babu, âgé de 23 ans. Ses jambes sont enflées à force de marcher. « Où est mon fils ? », ne cesse-t-elle de demander, mais personne ne peut lui fournir de réponse.

« Je veux pouvoir l’enterrer…. »

Mehera se souvient qu’elle et Shiuly, sa fille aînée, étaient inquiètes pour Babu le 23 avril 2013 quand les travailleurs ont été renvoyés à la maison plus tôt que prévu à cause de fissures apparues dans les murs du complexe d’ateliers textiles. Elles ont dit à Babu de rester à la maison le lendemain, mais il ne pouvait pas. La vie était devenue très difficile pour le jeune homme depuis la mort de son père, car il devait rembourser un prêt conséquent contracté pendant la maladie de celui-ci.

Le 24 avril, il était environ neuf heures du matin lorsque le bâtiment dans lequel Babu avait commencé à travailler à peine neuf jours auparavant s’est effondré. Quand elle a appris la nouvelle, Shiuly s’est précipitée sur les lieux. Des gens de tous horizons – journalistes, représentants de la loi, volontaires – se trouvaient près du Rana Plaza, mais pas Babu. Pendant des jours, Shiuly et sa mère l’ont cherché partout, dans tous les endroits où il aurait pu être, vivant ou mort.

« Avant d’être engagé pour faire du repassage, mon fils travaillait comme assistant de chauffeur de bus », explique Mehera. « Quelle ironie ! Il est mort dans cet atelier textile alors que nous pensions que ce travail était bien moins dangereux que l’autre. »

La famille de Babu a été l’une des premières à fournir un échantillon d’ADN. On lui a dit qu’on la contacterait en cas de correspondance, mais elle n’a eu pour l’heure aucune nouvelle. « Rendez-moi le corps de mon Babu, je veux pouvoir l’enterrer ! », s’écrie Mehera.

Une longue attente

Depuis l’effondrement du Rana Plaza à Savar, le département chargé de la recherche de personnes du Croissant-Rouge du Bangladesh, avec l’aide du CICR, traite des demandes de recherche émanant de familles cherchant leurs proches. Tandis que bon nombre des personnes dont on était sans nouvelles ont été retrouvées dans les hôpitaux ou parmi les morts, plusieurs familles ignorent toujours le sort de leurs proches. L’attente engendre une grande souffrance chez ces familles, qui espèrent encore avoir des réponses un jour.

Chaque fois qu’une catastrophe frappe et fait des disparus, les proches sont plongés dans une terrible angoisse. Et tant que la lumière n’est pas faite sur le sort des disparus, ils ne peuvent pas faire leur deuil ni aller de l’avant.


 


Mehera Begum montre les vêtements que Babu avait l’habitude de porter. ©CICR/R. Sultana Toma