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Ouganda : promotion de la santé communautaire à Gulu

09-10-2007 Éclairage

Le centre de santé de Labworomor, dans le district de Gulu, a remarquablement amélioré le sort de milliers d’habitants et de déplacés internes. Néanmoins, le petit bâtiment de quatre pièces qui abrite la clinique n’a pas été épargné par les vingt ans de conflit qui ont ravagé le nord de l’Ouganda. Le journaliste Denis Ocwich relate les efforts soutenus que déploie le CICR dans la région pour remettre en état 13 centres de santé détériorés.

     
    ©CICR/D. Ocwich      
   
    Nord-est de Gulu. Les patients font la queue au centre de santé délabré de Labworomor, dans le camp de Palaro. Le CICR s’apprête à rénover le bâtiment et à construire un pavillon de 8 lits pour la maternité.      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    Des enfants pompent de l’eau dans un puits de forage installé par le CICR devant le centre de santé.      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    District de Gulu. Des sages-femmes traditionnelles suivent une formation sur la maternité sans risque organisée par le CICR au centre de santé de Lugore.      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    Trento Kasuze (à gauche), auxiliaire médical au centre de santé de Labworomor, avec des couples venus pour des conseils prénatals.      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    Florence Aneko, une collaboratrice médicale du CICR, utilise une poupée pour la formation des sages-femmes au centre de santé de Lugore.      
           

Au centre de santé de Labworomor, qui appartient au gouvernement, le plafond tombe en pourriture, le ciment des murs s’écaille, et le béton du sol et de la véranda est plein de trous et de fissures.

Quand nous sommes arrivés, vers midi, plus de 20 personnes – principalement des femmes et des enfants – attendaient patiemment d’être examinées par deux des trois auxiliaires médicaux, mal équipés, du centre de santé.

Devant la salle de soins, une vieille femme malade d’environ 60 ans, ses mains ridées sur les genoux, attend en frissonnant sur un banc de bois. Elle vient pour une piqûre contre la malaria. Les médicaments sont disponibles, mais les deux auxiliaires médicaux sont submergés par le nombre de patients.

« Parfois, nous attendons cinq heures pour être soignés », déplore la grand-mère tout en reconnaissant les efforts fournis par les deux auxiliaires médicaux du centre.

  Une atmosphère de paix  

Le centre de santé de Labworomor, coincé au milieu du camp de déplacés internes de Palaro, dans le nord-est de Gulu, rappelle les effets déplorables que peut avoir un conflit sur les services de santé. Alors qu’une atmosphère de paix commence à régner sur la région, les déplacés entreprennent de recoller les morceaux de leur vie, grâce aux pourparlers de paix qui se tiennent actuellement entre l’Armée de résistance du Seigneur, dirigée par Joseph Kony, et le gouvernement ougandais.

La rénovation des infrastructures médicales tombées en ruines est une des priorités majeures du gouvernement. Par conséquent, la direction des services de santé du district a passé des accords avec des organisations internationales et des ONG pour améliorer le secteur de la santé dans le district. Le gouvernement intensifie aussi ses efforts pour recruter et motiver du personnel sanitaire destiné à travailler dans des lieux isolés et appauvris tels que Labworomor.

Le CICR a accepté avec enthousiasme d’apporter son soutien à la direction des services de santé du district. Comptant parmi les organisations humanitaires de premier plan qui travaillent dans cette région conflictuelle, le CICR a intensifié ses efforts pour améliorer la qualité des services de santé dans les communautés touchées par la guerre, à Palaro, un sous-comté du district de Gulu.

« Nous allons remettre à neuf le centre de santé de Labworomor et construire un pavillon de huit lits pour la maternité », affirme Rose Agengo, déléguée santé à la sous-délégation du CICR à Gulu.

  Renforcer la responsabilité sociale par la formation  

Le CICR stimule la responsabilité sociale en assurant la formation des équipes rurales de soins de santé, des sages-femmes traditionnelles et des personnes ressources des communautés. Cette formation s’inscrit dans le cadre des efforts déployés par le gouvernement pour associer les communautés à la gestion des centres de santé. Ces volontaires n’ont pas de salaire, mais reçoivent des témoignages de reconnaissance tels que du savon, des tee-shirts ou des bottes.

L’idée qui sous-tend ce bénévolat est de donner aux communautés locales les moyens de prendre en charge leurs propres services de santé et d’assurer une distribution appropriée des médicaments.

« Par exemple, la formation des sages-femmes traditionnelles est partie intégrante de la maternité sans risque et de la santé génésique », explique Rose Agengo. « En identifiant les risques durant la grossesse, nous voulons garantir que les accouchements se déroulent dans de bonnes conditions de sécurité et d’hygiène. »

Afin de réduire le nombre de cas de malaria parmi les femmes enceintes et les enfants en bas âge, le CICR distribue gratuitement aux futures mères des moustiquaires imprégnées d’insecticide. En outre, les hommes sont encouragés à accompagner leur femme enceinte aux visites à la maternité. Cette pratique étant encore dédaignée, les hommes qui l’adoptent reçoivent des moustiquaires en récompense, à leur première visite au centre de santé.

Pendant notre visite au camp de déplacés de Lugore, à l’heure du déjeuner, nous avons rencontré un groupe de sages-femmes traditionnelles (âgées entre 30 et 60 ans) qui participaient à une séance de formation sur la maternité sans risques, sous un manguier, devant le centre de santé II de Lugore.

Leur formatrice Florence Aneko, field officer responsable de la santé génésique à la sous-délégation du CICR à Gulu, utilisait un mannequin en plastique et un bassin artificiel pour montrer comment agir en cas de grossesse et d’accouchement. Élégamment vêtues de gomesis roses (tenue locale) donnés par le CICR, les femmes écoutaient attentivement et montraient, l’une après l’autre, leurs talents en obstétrique, en se servant du mannequin et du bassin.

« Maintenant, nous sommes prêtes à soutenir le personnel sanitaire, car nous avons reçu une bonne formation », affirme Christine Lukwiya, présidente du groupe des sages-femmes traditionnelles de Lugore. Depuis l’année dernière, 50 femmes ont été formées pour donner des consultations gratuites aux femmes enceintes dans quatre villages de la paroisse d’Ovalo (Palaro).

En plus d’encourager et d’aider les femmes enceintes à faire appel à du personnel sanitaire qualifié, les sag es-femmes traditionnelles attirent l’attention du public sur les soins postnatals, les vaccinations des enfants et la planification familiale.

« Malgré la guerre, les femmes dans les camps sont très fertiles et les naissances extrêmement nombreuses. Notre travail est d’expliquer aux femmes qu’il est bénéfique de laisser passer une période assez longue entre chaque grossesse/enfant », fait remarquer Vicky Adokorach, la plus jeune sage-femme (30 ans).

  Effets positifs sur la communauté  

Les efforts déployés par les sages-femmes traditionnelles, qui reçoivent du CICR du matériel pour l’accouchement, ont déjà des effets positifs sur la communauté, notamment l’augmentation du nombre de femmes de la campagne qui se rendent dans les centres de santé pour l’accouchement. Un nombre encore plus élevé de femmes se présentent à des consultations prénatales et postnatales aux centres de santé.

« Certaines femmes, qui accouchaient chez elles, détestaient aller au centres de santé. Mais maintenant, nous voyons venir plusieurs d’entre elles », dit Trento Kasuze, le rayonnant auxiliaire médical de 40 ans, qui a longtemps bravé l’insécurité et risqué sa vie pour diriger le centre de santé de Labworomor, parfois sans aucune aide, parfois sans médicaments ni matériel.

Le vaste programme de santé du CICR ne se limite pas à Labworomor. Treize autres centres de santé au nord de l’Ouganda bénéficient du soutien de l’institution. Le programme comprend la remise en état des centres détériorés, la construction de pavillons de maternité, de toilettes, de salles de bain et de barrières autour des bâtiments.

En outre, le CICR garantira l’accès à l’eau potable, fournira des médicaments, si nécessaire, formera des équipes rurales de soins de santé et des sages-femmes traditionnelles, et développera les relatio ns et la coopération entre les volontaires et les centres de santé (objectifs communs, mobilisation des mêmes populations cibles). Le CICR réalisera une supervision hebdomadaire avec l’équipe de soins de santé du district.

Le CICR est la seule organisation engagée dans un si large éventail d’activités en faveur des centres de santé, conciliant ainsi les besoins de l’urgence et du développement. Ce sont là des mesures significatives pour remettre à neuf les services de santé communautaires dans cette partie de l’Ouganda ravagée par la guerre.

« Même quand les déplacés retourneront dans leurs villages, quand la paix sera garantie, ce centre de santé servira encore à des milliers de paysans », affirme Trento Kasuze.