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Afghanistan : sensibilisation aux dangers des mines au poste de santé

31-10-2004 Éclairagede Jessica Barry

Un dispensaire à Kalakan, région particulièrement infestée de mines située dans la plaine de Shamali, au nord de Kaboul, peut ne pas apparaître comme le meilleur lieu pour faire de la prévention contre les dangers des mines. C’est sans compter le fait que ce genre d’endroit se prête bien à ce genre d’activités, vu le grand nombre de personnes qui s’y rendent et qui sont concernées par le problème des mines.

Ce jour-là, il ne s’agit pas d’une séance ordinaire : en effet, toutes les personnes qui sont réunies au dispensaire, public et animateurs confondus, sont des femmes. C’est d’autant plus inattendu que, dans un pays comme celui-ci, en particulier dans les régions rurales, les femmes ne s’aventurent que rarement hors de chez elles.

 
   
©ICRC / J. Barry 
 
Une des femmes présentes vient d’un village éloigné. Elle a marché deux heures pour venir jusqu’à Kalakan. Vêtue d’une robe à fleurs violettes, qu’elle porte par-dessus des pantalons traditionnels bouffants rouges, elle dissimule timidement son visage lorsqu’on lui demande son nom. Montrant du doigt la femme en compagnie de laquelle elle est venue, elle déclare : « Elle, c’est Jamila. » Et, s’armant de courage, elle finit par ajouter : « Moi, je m’appelle Atlas. Nous savons bien qu’il y a des mines, là-bas dans la montagne, derrière notre village, là où les enfants font paître les animaux. »
 
Farida, 22 ans, fait de la prévention contre les dangers des mines depuis deux ans. Avec sa collègue Malina, 25 ans, elle fait partie d’une équipe de quatre femmes mandatée par le siège du Croissant-Rouge afghan à Kaboul.
 
Les quatre femmes visitent régulièrement une vingtaine d’hôpitaux et de dispensaires des provinces de Parwan et de Kaboul. Elles y mettent en garde les femmes contre les danger s des mines terrestres et des munitions non explosées, comme les roquettes et les obus de mortier. Elles leur donnent également de précieux conseils sur la façon de vivre en sécurité dans des zones infestées par ces engins.
 
Avec des mots simples, Malina s’adresse à l’auditoire largement illettré qui est le sien, expliquant la manière dont les champs de mines sont signalés : « Lorsque vous vous retrouvez face à une ligne rouge et blanche peinte sur les pierres, vous pouvez marcher sans danger du côté des pierres blanches, mais vous devez prendre soin d’éviter le côté rouge. Vous augmenterez en outre votre sécurité et celle de vos enfants en n’empruntant que des sentiers bien tracés et en vous abstenant de ramasser des objets non identifiés. »
 
Au terme de la séance, Atlas met la main sur un dépliant bleu et jaune, et pensive, examine attentivement les images de balises utilisées pour signaler la présence de mines et les illustrations d’enfants montrant à leurs camarades comment éviter les zones dangereuses.
 
« Je le mettrai au mur de ma maison pour que tout le monde puisse le voir », lâche -t-elle.
 
Il était grand temps que le Croissant-Rouge afghan se décide à étendre ses campagnes de sensibilisation aux femmes. Les statistiques font effectivement apparaître que le nombre de femmes victimes de ces engins en Afghanistan est en augmentation. Accessoirement, les mères pourront à leur tour transmettre à leurs enfants les connaissances qu’elles auront ainsi acquises en la matière.  
   
©ICRC / J. Barry 
D’une durée approximative d’une heur e, les séances de sensibilisation aux dangers des mines organisées par le Croissant-Rouge afghan comportent un volet théorique et une partie pratique. Les jeunes apprécient l’approche interactive proposée, tandis que les femmes sont généralement plus réticentes.
 
« En ce qui me concerne, le plus dur, dans ces cours, est d’amener les mères à participer aux jeux de rôles, admet Farida. La plupart sont beaucoup trop timides. »
 
Lorsqu’on lui demande si elle, elle a hésité avant de se lancer dans la prévention contre les dangers des mines, la jeune femme répond en souriant : « Non, pas un instant. J’ai toujours voulu faire quelque chose pour aider les autres. En outre, le travail est très intéressant. » Et de rajouter après une pause : « Mais je suis fiancée et je vais me marier ; et je ne sais pas si mon mari sera d’accord que je continue une fois que nous serons mariés. J’espère que oui. »
 
Le programme de sensibilisation aux dangers des mines du Croissant-Rouge afghan remonte à 1994. Il couvre actuellement le centre, l’est et le nord du pays et emploie 52 personnes, qui sont assistées dans leur tâche par plus de 150 volontaires. Le CICR soutient le programme depuis 1995. Il participe notamment à la formation des formateurs et supervise les différentes activités. Au cours des mois à venir, le programme sera étendu aux provinces occidentales et devrait finalement aussi être lancé dans le sud de l’Afghanistan dans le courant de l’année prochaine.