Rwanda : les retrouvailles d’un fils avec son père après 22 ans de séparation
Raymond Ngendahimana avait 4 ans quand il a été séparé de sa famille en 1994, pendant le génocide rwandais. Le 26 août dernier, après 22 années passées à se demander s'il reverrait les siens un jour, il a retrouvé son père avec l'aide du CICR. Pour lui et sa famille, c'est une nouvelle vie qui commence.
Le jeune homme n'a pu retenir ses larmes de joie au moment des retrouvailles. « J'étais sûr que je ne reverrais jamais les membres de ma famille, qu'ils avaient tous été tués. Je n'arrive pas à croire qu'ils ont tous survécu ! », s'est-il exclamé.
Le visage inondé de larmes, son père, Jean Biziyaremye, aujourd'hui âgé de 60 ans, l'a serré dans ses bras. « C'est incroyable ! Je n'ai jamais oublié ton visage. Je rêvais de toi, et maintenant tu es là, devant moi ! Merci mon Dieu ! », s'est-il écrié, tout à sa joie d'avoir retrouvé son fils après 22 ans de séparation.
Raymond a bénéficié d'un programme de rétablissement des liens familiaux (RLF) mis en œuvre par le CICR pour aider les membres de familles dispersées à rétablir le contact. La plupart des bénéficiaires sont des enfants non accompagnés qui ont été séparés de leur famille par un conflit armé. Le CICR a mis plus de 12 ans à retrouver la famille de Raymond en raison d'une confusion quant à son lieu de naissance, qui a compliqué les recherches. Tout a changé en juin 2016, lorsque Raymond a demandé au CICR de faire une dernière tentative. Une annonce a été diffusée à la radio et, une semaine plus tard, le CICR recevait une lettre d'un certain Jean Biziyaremye qui affirmait être le père de Raymond. Le CICR l'a fait venir pour qu'il identifie son fils parmi un groupe de cinq jeunes hommes, et M. Biziyaremye a immédiatement reconnu Raymond.
Survivre à tout prix
En 1994, Raymond a fui le Rwanda pour échapper au génocide, perdant tout contact avec sa famille. Il s'est retrouvé seul dans un camp de réfugiés en République démocratique du Congo, près de la frontière avec l'Angola, où il s'est débrouillé pour survivre en exécutant des travaux domestiques. « Vous n'avez aucune idée de l'enfer que j'ai vécu là-bas. Je n'avais que 4 ans. C'était vraiment très dur. »
Raymond ne savait rien de ses origines. Quand le CICR l'a rapatrié au Rwanda après l'avoir pris en charge au Congo, il a d'abord été placé dans un orphelinat puis dans une famille d'accueil, mais les conditions y sont devenues trop dures. Il a donc choisi de s'enfuir et de tenter sa chance dans la rue, où il a vécu pendant 5 ans. Il n'avait qu'un seul but : survivre pour honorer le souvenir de sa famille, dont il pensait être le seul survivant. En 2010, il a décidé de chercher du travail. La journée, il est chef d'équipe dans une société de nettoyage à Kigali, et la nuit, vigile dans un centre de soins de santé.
Le début d'une nouvelle vie
« Maintenant que j'ai retrouvé ma famille, j'ai de nouveau foi en l'avenir, a-t-il expliqué. Si j'ai besoin d'un conseil, j'aurai désormais quelqu'un vers qui me tourner. C'est une nouvelle vie qui commence. Avec mon père à mes côtés. » Raymond sait désormais qu'il est originaire de Nyamata, dans le district de Bugesera (province de l'Est).
Au Rwanda, le CICR continue d'aider des personnes séparées de leur famille à retrouver les leurs, en coopération avec la Croix-Rouge rwandaise. En mai 2016, nos équipes étaient encore à la recherche des proches de plus de 150 enfants rwandais non accompagnés et d'une centaine d'adultes. Le CICR aide aussi les réfugiés burundais et congolais présents au Rwanda à garder le contact avec les membres de leur famille qui sont à l'étranger, ou à les retrouver s'ils n'ont plus de nouvelles d'eux.