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Burundi : réfugiés et sans nouvelles de leurs familles

Sylvie Zawadi Miranyo : « J’ai traversé la frontière pour trouver refuge au Burundi avec mon seul garçon. Je n’ai aucune nouvelle de trois enfants et eux aussi ne savent pas où nous sommes »
Sylvie Zawadi Miranyo : « J’ai traversé la frontière pour trouver refuge au Burundi avec mon seul garçon. Je n’ai aucune nouvelle de trois enfants et eux aussi ne savent pas où nous sommes ». CICR

Les conflits armés dans l’Est de la République démocratique du Congo ont provoqué des déplacements de population vers le Burundi voisin. Les réfugiés rencontrent des difficultés à connaitre le sort de leurs familles. Le CICR en collaboration avec la Croix-Rouge du Burundi travaille à réunir les personnes séparées par ce conflit.

Sylvie Zawadi Miranyo est parmi ces réfugiés séparés de leurs familles. Après avoir quitté Goma à cause du conflit en RD Congo, elle cherche désespérément à retrouver la trace de ses trois enfants. Commerçante, elle s’était rendue au marché avec son plus jeune fils lorsque sa ville a été violemment attaquée. Une bombe a frappé leur maison. Aussitôt, Sylvie et son fils ont tenté de rentrer chez eux pour voir ce qui s’était passé, mais en chemin, les crépitements d’armes se sont intensifiés et ils ont dû rebrousser chemin.

« Mon mari était malade, il était resté à la maison. J’ai appris qu’il n’a pas survécu », déplore-t-elle.

Effrayés et paniqués, Sylvie et son fils ont décidé de fuir les violences. Ils ont quitté Goma pour aller se réfugier à Bukavu. 

« Je suis partie la mort dans l’âme parce que mes trois enfants étaient encore à l’école et depuis ces événements, je n’ai aucune nouvelle de mes deux filles et mon garçon et eux aussi ne savent pas où nous sommes », raconte-t-elle.

Avant de quitter Goma, Sylvie Zawadi Miranyo se souvient avoir laissé un message à quelques connaissances pour informer ses enfants qu’elle se rendait à Bukavu.

« Malheureusement, je n’ai pas passé beaucoup de temps à Bukavu parce que la ville a été attaquée et j’ai traversé la frontière pour trouver refuge au Burundi avec mon seul garçon. » 

Aujourd’hui, elle vit dans l’angoisse d’une séparation qui dure depuis trop longtemps, sans aucune nouvelle de ses enfants : « Je ne sais pas où ils sont et dans quelles conditions ils sont. Mon seul souhait est de croiser encore une fois le regard de mon mari et de mes trois enfants »

Installée au camp des réfugiés de Musenyi, dans le sud-Est du Burundi, Sylvie confie que son avenir est plus incertain que jamais : « Je mène avec mon seul enfant qui me reste une vie précaire. L’accès à l’eau potable, à la nourriture et aux soins médicaux est un défi quotidien. L’aide est insuffisante. » 

Entre angoisse et incertitude

Daniela Mapendo Santana est aussi venue chercher un refuge de l’autre côté de la rive.

« J’ai abandonné tous mes biens à Goma vers fin janvier 2025 pour aller à Bukavu. J’ai par après fui vers Kamanyola. Les combats se sont poursuivis et j’ai décidé d’aller au Burundi en traversant la rivière Rusizi. »

Daniela est bouleversée par la séparation de son mari et de ses deux enfants : « Nous nous sommes séparés au moment de la débandade et je n’ai aucune nouvelle d’eux. J’ai de l’anxiété et la difficulté de les retrouver. Ce qui est important pour moi est de revoir mon mari et mes deux enfants ici. Sans eux, je ne suis pas tranquille. C’est triste de ne pas les avoir », explique-t-elle, la voix tremblante.

Cette quadragénaire indique que la vie est difficile dans le camp car l’assistance reste insuffisante.

“Ce qui est important pour moi est de revoir mon mari et mes deux enfants. Sans eux, je ne suis pas tranquille. C’est triste de ne pas les avoir » - Daniela Mapendo Santana.

Daniela Mapendo Santana : “Ce qui est important pour moi est de revoir mon mari et mes deux enfants. Sans eux, je ne suis pas tranquille. C’est triste de ne pas les avoir »
CICR

Séparés à cause du conflit

Adèle Muhindo, mère de 3 enfants, vivait près de l’aéroport de Kavumu à Bukavu. Elle a dû abandonner sa maison.
« Quand les conflits ont éclaté, mon mari n’est pas rentré. Je l’ai attendu pendant trois jours en vain », raconte-t-elle.

Sans nouvelles de lui, elle a décidé de fuir avec ses enfants jusqu’à Uvira, puis de traverser la frontière pour se réfugier au Burundi. 
« J’ai passé plusieurs semaines sans aucune nouvelle de mon mari. Quand on nous a transférés ici à Musenyi, j’avais l’espoir de le retrouver dans ce camp et m’aider à subvenir aux besoins de la famille mais je ne l’ai pas retrouvé », déplore-t-elle.

Adèle a finalement appris que son mari se trouvait au centre de transit de Gihanga et qu’il avait laissé un numéro de téléphone, celui de son voisin : « Je suis allée au bureau de la Croix-Rouge et je l’ai contacté. Même si je ne l’ai pas encore vu, cet appel m’a soulagé ».

Adèle Muhindo est confrontée à des difficultés économiques. Les conditions de vie dans le camp sont précaires.

Adèle Muhindo : « Je n’ai aucune nouvelle de mon mari et en même temps je suis confrontée à des difficultés économiques. Les conditions de vie dans le camp sont précaires. »
CICR

Le CICR travaille à rétablir le lien entre les proches, séparés par le conflit

Depuis le début des conflits dans l’Est de la RDC suivi par l’afflux des réfugiés congolais sur le sol burundais, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), en collaboration avec la Croix-Rouge du Burundi et la Croix-Rouge de la RD Congo, a déjà fourni plus de 3000 appels téléphoniques gratuits. 

Plus de 4000 bénéficiaires se sont connectés à internet et environ 48 000 réfugiés qui tentent de contacter les membres de leurs familles, ont bénéficié des services de recharge gratuite des téléphones portables et des services internet. 

Ce travail se poursuit dans différents camps de réfugiés et sites de transit. Ces trois organisations coopèrent également pour localiser les personnes portées disparues.