Madagascar : à l’intérieur des murs de la prison.
A Antananarivo, au cœur de la capitale de Madagascar, Ndranto vient de sortir de prison. Agé d'une vingtaine d'années, le jeune homme a passé plus d'un an derrière les barreaux. Il aurait encore été enfermé s'il n'avait pas bénéficié de la grâce présidentielle accordée en début d'année 2016. Le regard un peu perdu, il revient sur ces derniers mois passés dans un monde à part...
« Je me souviens encore de mon premier jour en prison ! Je me sentais perdu, égaré parmi des gens que je ne connaissais pas et dans un endroit totalement inconnu », confie-t-il. Après le choc des premiers instants dans ce nouvel univers, Ndranto commence à prendre ses marques. « Je me débrouille pas mal en coiffure, du coup j'aidais les autres détenus et en retour, je recevais du riz ou de l'argent, 300 Ariary. Cela aide un peu quand on n'a pas de famille qui vous apporte à manger et qu'on n'a qu'une seule ration de manioc tous les après-midi à manger. »
Loin de sa famille et de ses amis, qui vivent à plus de 400 km du lieu où il est détenu, Ndranto doit se débrouiller seul. Au-delà des conditions carcérales, qui ne sont pas forcément évidentes, la solitude joue sur le moral. « Le plus dur pour moi a été d'être séparé de ma famille, c'était la première fois que j'avais été incarcéré. A un moment, j'étais très malade, j'avais le palu. A force de rester debout au soleil pour exercer mes talents de coiffeur, je me sentais bizarre à la fin de la journée, comme si j'avais pris un coup de froid. J'étais malade pendant trois jours avant que le responsable de mon quartier ne m'envoie à l'infirmerie. Durant ces trois jours, j'avais le vague à l'âme, je me sentais vraiment seul, sans personne pour me rendre visite, sans famille pour venir à mon chevet... Je priais... Heureusement, à l'infirmerie, on m'avait prescrit une ordonnance et donné des médicaments. J'ai pu guérir par la suite.»
Pour passer le temps, Ndranto essaye de s'adonner à une activité physique au quotidien : « Je faisais du va-et-vient dans la cours », et profite des occasions qui lui sont offertes pour se divertir et évader son esprit. Il se souvient encore du spectacle que le CICR avait organisé avec une artiste malgache de renom dans l'enceinte de la prison. Il se rappelle également que des équipes du CICR venaient en prison pour distribuer du savon ou effectuer une campagne de désinsectisation afin de préserver l'hygiène.
En prison, les maladies peuvent vite se propager. Ndranto explique : « Le quartier n'était pas spacieux alors qu'on était nombreux à l'intérieur et on suffoquait vite de chaleur. Lorsque quelqu'un était malade, ou revenait de l'infirmerie, il risquait de contaminer les autres parce qu'on était collé les uns aux autres ».
L'ensemble des prisons à Madagascar souffre de surpopulation. Un problème chronique qui empêche les autorités de répondre efficacement aux besoins quotidiens et légitimes des détenus. Des besoins fondamentaux pourtant conformes aux exigences du droit malgache ainsi qu'aux normes et standards internationaux de la détention. C'est justement pour cela que le ministère de la Justice malgache, le Service de Coopération et d'Action Culturelle auprès de l'Ambassade de France à Madagascar et le CICR se sont penchés sur la question lors d'un atelier avec une centaine de magistrats et de responsables de l'Administration Pénitentiaire en octobre 2015, à Antananarivo.
Outre la grâce présidentielle dont Ndranto a bénéficié, d'autres mesures doivent être prises pour diminuer une surpopulation carcérale devenue insupportable. Plus de 60% des détenus étant des prévenus, le respect des garanties judiciaires et une justice plus efficace et agile sont devenus des impératifs urgents !
Hors de la prison, Ndranto songe maintenant à une carrière dans la coiffure. Un avenir auprès des siens qu'il souhaite plus prometteur.