Une terrible sécheresse frappe cette année le Sahel, rendant la vie encore plus difficile pour les populations qui subsistent grâce aux ressources naturelles. Les effets des aléas climatiques, alliés aux conséquences des violences et conflits armés, poussent certains à partir. Migrer vers l'Europe devient une solution pour de nombreux fils d'éleveurs et d'agriculteurs en manque d'avenir et de revenus. En chemin, certains de ces jeunes meurent ou disparaissent.
La Mauritanie est un des pays de départ. En 2015, Amadou* décide de partir pour l'Europe. Son père lui dit « ne passe surtout pas par la Libye». Le jeune homme ne l'a pas écouté. Depuis, sa famille n'a plus de nouvelles et craint le pire. Sa sœur le garde avec elle, sur son portable. Son humour lui manque.
*Le prénom a été modifié par souci de protection.
« Mon fils est-il vivant ou mort ? » demande Sia à des employés du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Croissant-Rouge mauritanien. S’il est mort, elle espère savoir un jour où il repose.
La question de cette mère illustre la souffrance spécifique de toutes les familles de personnes portées disparues, cette « perte ambiguë » pour reprendre le terme de la psychologue américaine Pauline Boss. Mort ou vivant ? Les familles naviguent entre deux rives, celles de la vie et de la mort, de l'espoir et du désespoir, dans l'attente d'une réponse qui, parfois, ne vient jamais.
A 23 ans, Ala Koné est déjà chef de famille. Il n'a plus de nouvelles de son frère aîné. Il y a trois ans, ce dernier l'avait appelé avant de partir pour l'Europe : « Sois courageux et occupe-toi bien de la famille ». Des mots qui résonnent aujourd'hui comme un adieu.
Au-delà de la souffrance, la disparition de ces jeunes hommes a des conséquences économiques pour les familles. Ils laissent derrière eux de vieux parents, parfois des épouses et des enfants, qui comptaient sur leurs revenus. La responsabilité de la famille élargie retombe alors le plus souvent sur le garçon le plus âgé.
"Nous sommes aveugles, vous êtes les guides" - ces paroles ont souvent été répétées à l'équipe du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et du Croissant-Rouge mauritanien venue rencontrer des familles de migrants portés disparus. Ici, l'équipe explique à des chefs de villages et pères de familles comment elle va les aider dans leurs démarches pour tenter de connaître le sort de leurs fils disparus. Ce travail, le CICR et les Croix-Rouge et Croissant-Rouge du monde entier le mènent depuis plus de 100 ans.
La Mauritanie est l'un des pays de départ et de transit de la migration en Afrique. Plusieurs jeunes se lancent à l'assaut du Sahara avec l'espoir d'arriver en Europe et d'y connaître un avenir radieux. Malheureusement, en chemin, beaucoup disparaissent laissant leurs familles face à des questionnements sur leur sort.
Le Croissant-Rouge mauritanien et Comité international de la Croix-Rouge accompagnent ces familles dans leurs démarches en vue de connaître le sort de leurs proches disparus.