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Syrie et pays voisins : la pénurie d’eau accable la population

Dans tout le Moyen-Orient, la population souffre de la pénurie d’eau. L’intensification de la violence ces dernières années et les précipitations exceptionnellement faibles enregistrées dans la région font qu’il est de plus en plus difficile de se procurer de l’eau potable – surtout en Syrie, où l’on s’attend à ce que l’insuffisance des pluies tombées l’hiver dernier ait de graves conséquences pour un grand nombre de personnes.

 

Jordanie, frontière nord-est avec la Syrie. Site de transit du CICR à Hadalat pour les réfugiés syriens. / CC BY-NC-ND/ICRC/O. Abu Rumman

 

« La production de blé, qui est cultivé principalement dans les régions du nord-est de la Syrie alimentées par la pluie, devrait atteindre un plus bas historique cette année », déclare Michael Talhami, coordonnateur des programmes eau et habitat du CICR. « Cela rendra la Syrie encore plus dépendante des importations de vivres. Elle sera par conséquent extrêmement vulnérable à toute flambée des prix des denrées alimentaires sur le marché mondial, qui exacerberait les difficultés auxquelles de nombreuses personnes sont déjà confrontées pour se procurer de la nourriture à un prix abordable. »

Des millions de personnes ont été déplacées par les combats et vivent dans des abris sans accès à l’eau potable. Les coupures de courant étant monnaie courante dans tout le pays et les réseaux de distribution de l’eau ayant subi des dommages, le défi consiste à transférer les faibles quantités d’eau encore disponibles jusqu’aux zones à forte densité de population.

Les Syriens qui ont maintenu leur activité agricole malgré le conflit en cours ont de plus en plus de mal à joindre les deux bouts, du fait de la baisse de leur production – et donc aussi de leurs revenus – et du prix élevé des denrées qu’ils doivent acheter lorsque ce qu’ils produisent ne suffit même pas à couvrir leurs propres besoins. Les stabilisateurs automatiques qui étaient en place avant le conflit, et qui permettaient de subventionner les fertilisants et les semences pour les producteurs et les denrées alimentaires pour les consommateurs, sont pour la plupart devenus inopérants.

« En coopération avec les spécialistes en eau et assainissement du Croissant-Rouge arabe syrien et les services des eaux locaux, nous nous attachons à améliorer l’accès à l’eau potable pour des millions de personnes dans toute la Syrie », déclare M. Talhami.

« Une grande partie de la région possède une infrastructure vieillissante qui demande beaucoup d’entretien, ajoute-t-il. En Jordanie, l’un des pays de la planète les plus pauvres en eau, la demande d’eau a considérablement augmenté, tant du côté des habitants que des réfugiés arrivés au fil des ans. L’eau est par ailleurs devenue plus chère, ce qui à son tour a induit une hausse du prix des denrées alimentaires. Dans les régions frontalières, le CICR s’efforce de fournir aux réfugiés syriens de l’eau potable, des services d’assainissement, des abris et d’autres biens de première nécessité. »

Bien que les réserves hydriques du Liban soient relativement abondantes, les faibles précipitations que le pays a connues ces dernières années font que, là aussi, il est devenu difficile d’assurer la qualité et la disponibilité de l’eau. Les réfugiés syriens sont dispersés sur tout le territoire libanais. Le CICR, en coordination avec les services des eaux locaux, s’emploie à moderniser les stations de pompage et les réseaux de distribution de l’eau pour améliorer l’approvisionnement et répondre aux besoins partout où ils se font sentir.

Du fait de l’afflux de réfugiés au Liban et en Jordanie et des déplacements internes en Syrie, les autorités locales se sont retrouvées à devoir fournir de l’eau potable et des services d’assainissement à un nombre de plus en plus important de personnes. Le CICR prévoit d’étendre ses activités pour faire face à ces besoins.

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Syrie

 
Le camp de Al Karnak camp à  Tartous abrite environ 1 500 personnes qui ont fui Alep. Le CICR fournit de l'eau potable et a réhabilité les latrines. / CC BY-NC-ND/ICRC/W.Zoubaidi
 

Le mois dernier, le CICR, en étroite collaboration avec le Croissant-Rouge arabe syrien et les services des eaux locaux, a :

  • approvisionné en eau plus de 100 000 personnes au moyen de six camions-citernes dans les gouvernorats de Homs, Damas-Campagne et Deir Ezzor ;
  • organisé le ramassage des ordures par camion-benne dans la ville d’Idlib, améliorant ainsi les conditions sanitaires de quelque 100 000 personnes ;
  • amélioré huit centres hébergeant des personnes déplacées dans les gouvernorats de Damas-Campagne et de Deraa, permettant ainsi à plus de 9 400 personnes d’avoir accès à l’eau potable, à des installations d’assainissement adéquates et à des logements décents ;
  • fourni du matériel pour traiter l’eau de la source de Figeh, qui alimente environ quatre millions de personnes vivant à Damas et dans les environs ;
  • procédé aux travaux d’entretien général et aux réparations d’urgence nécessaires pour continuer d’assurer l’approvisionnement en eau potable de plus d’un million de personnes dans les gouvernorats de Damas-Campagne et de Deir Ezzor ;
  • fourni des pièces de rechange mécaniques et électriques pour 15 pompes submersibles afin d’accroître la capacité de diverses stations d’approvisionnement en eau dans le gouvernorat de Hassakeh, comme celles de Ras Al-Ayn, Al-Malekia, Al-Jawadiah et Qamishly, qui desservent conjointement plus de 800 000 personnes.

 

Jordanie

Bustana, à la frontière nord est de la Jordanie avec la Syrie. Des enfants réfugiés syriens à une fontaine d'eau installée par le CICR. / CC BY-NC-ND/ICRC/A. Wagnieres

 

Pour aider les forces armées jordaniennes à faire face à l’afflux croissant de réfugiés qui franchissent la frontière orientale du pays, le CICR a, depuis le début de 2013 :

  • fourni des équipements à six centres de transit situés dans les régions frontalières afin de leur permettre d’accueillir dans des conditions adéquates quelque 1 200 réfugiés syriens par jour ;
  • mis en place dans la région frontalière orientale 50 caravanes servant d’abris, 20 caravanes sanitaires, 90 bennes à ordures, 7 générateurs, 46 tentes, 10 chauffe-eau solaires, 13 refroidisseurs d’eau potable, 12 grandes cuvettes, 14 pompes à eau et 41 réservoirs d’eau ;
  • installé dans le centre d’enregistrement de Rabaa Al-Sarhan (gouvernorat de Mafraq) trois caravanes sanitaires, sept refroidisseurs d’eau potable, cinq réservoirs d’eau et dix bennes à ordures ;
  • mis en place dans le camp pour déserteurs syriens de Manshiyat Al-Alyan (gouvernorat de Mafraq) 6 caravanes sanitaires, 10 refroidisseurs d’eau potable, 9 réservoirs d’eau, 10 bennes à ordures, 13 grandes cuvettes, 6 chauffe-eau solaires et 2 pompes à eau ;
  • distribué 18 000 litres d’eau potable par jour dans le camp de Manshiyat Al-Alyan par l’intermédiaire d’une entreprise jordanienne.

 

Liban

 Des réfugiés syriens vivent dans ces tentes, dans la vallée de la Bekaa, l'une des régions du Liban particulièrement touchées par la pénurie d'eau. / CC BY-NC-ND/ICRC/N.Ismail  

 

Entre mai et décembre 2013, le CICR a mené à bien huit projets dans le pays, comprenant notamment la fourniture de pompes et de générateurs ainsi que la rénovation de stations de pompage. Ils ont bénéficié à quelque 220 000 personnes – résidents locaux et réfugiés.

Cette année, des projets ont été lancés ou sont sur le point de l’être à Zahle, Chamsine, Abu Halka, Hebberiye, Hasbaya et Kfeir, qui bénéficieront à plus de 250 000 personnes. D’autres projets à l’étude à Aarsal, Flawi, Laboue, Sour et Chebaa pourraient bénéficier à quelque 270 000 personnes. Le CICR a par ailleurs contribué à la rénovation d’un hôpital à Ain El Helwé qui avait été endommagé lors de combats. Il a également entamé des missions d’évaluation sur le terrain et des discussions avec les autorités municipales en vue de mettre en route de nouveaux projets visant à assurer l’approvisionnement en eau des réfugiés et des communautés d’accueil dans les régions qui connaissent une forte concentration de réfugiés.

 

Irak

 Centre pour personnes déplacées dans la région de Khanaqin. Point de distribution d'eau installé par le CICR. / CC BY-NC-ND/ICRC/S. Dabbakeh

 

Le conflit armé irakien s’est propagé d’Anbar à d’autres régions du pays, faisant des milliers de morts et plus de 800 000 déplacés. Le pays accueille par ailleurs plusieurs milliers de personnes qui ont fui le conflit en Syrie.

Les infrastructures d’approvisionnement en eau sont mises à rude épreuve par les combats et le nombre élevé de personnes déplacées. Le gouvernement a pris des mesures pour faire face à la situation, mais les coupures d’électricité et la pénurie de carburant, de produits pour le traitement de l’eau et de pièces de rechange risquent de réduire encore davantage la capacité d’approvisionnement en eau.

Le CICR mène des activités dans les provinces d’Anbar, de Babel, de Diyala, de Kirkouk, de Missan, de Ninive et de Salah al-Din. Il a notamment :

  • construit ou rénové 10 installations d’approvisionnement en eau ;
  • procédé à 15 réparations d’urgence sur des installations d’approvisionnement en eau ;
  • installé des réservoirs d’eau et fourni de l’eau à sept centres et deux camps pour personnes déplacées ;
  • remis en état un centre de soins de santé primaires qui avait été endommagé lors d’affrontements à Ramadi (Anbar) ;
  • organisé trois cours de formation pour 45 techniciens dans des stations de traitement des eaux du sud de l’Irak ;
  • réparé deux canaux d’irrigation à Kirkouk et Babel, qui bénéficieront à 24 700 personnes.

Globalement, le CICR a amélioré l’accès à l’eau potable de 372 000 personnes (notamment des déplacés) dans tout l’Irak, réduisant ainsi le risque d’épidémies.

 

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 La crise de l'eau au Moyen Orient et le conflit syrien

  • Pour en savoir plus : le coordinateur eau et habitat du CICR pour l'Afrique du nord et le Moyen Orient explique les effets de la crise régionale de l'eau, en relation avec les conséquences du conflit en Syrie (en anglais).