Hôpital de campagne de la Croix-Rouge à Rafah, bande de Gaza : Faits et chiffres, 9 mai 2024 – 12 avril 2025

L'hôpital de campagne de la Croix-Rouge a été établi et inauguré le 9 mai 2024. Il opère en coordination avec le Croissant-Rouge palestinien et bénéficie du soutien des Croix-Rouges d'Allemagne, d'Australie, d'Autriche, du Canada, de Chine (antenne de Hong Kong), du Danemark, de Finlande, de France, d'Islande, du Japon, de Norvège, de Suède, de Suisse et du Royaume-Uni.
Situé dans le quartier de Rafah, dans la bande de Gaza, il a pour unique objectif de fournir des services médicaux aux civils touchés par le conflit armé en cours.
Un an plus tard…
En mai 2024, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR), 14 Sociétés de la Croix-Rouge et le Croissant-Rouge palestinien (CRP) ont collaboré à la création de l'hôpital de campagne de la Croix-Rouge afin de répondre aux besoins médicaux considérables résultant du conflit armé en cours. Ce qui n'était au départ qu'une intervention médicale temporaire s'est transformé en un effort nourri d'une année. Pendant un an, les équipes ont travaillé sans relâche pour sauver de nombreux patients; malheureusement, de nombreux autres ont perdu la vie.
« Personne ne s'attendait à ce que les souffrances humaines, et donc la nécessité d'un hôpital de campagne, soient aussi immenses ou durent aussi longtemps. Mais tant qu'il y aura des victimes de guerre, notre engagement à soigner les malades et les blessés ne faiblira pas. » Julien Chassany, Chef des programmes du CICR pour Israël et les territoires occupés.
L'hôpital de campagne de la Croix-Rouge a été directement touché par les opérations militaires menées dans la bande de Gaza, depuis les opérations actives à Rafah en avril 2024 pendant la phase de construction de l'hôpital, jusqu'aux escalades récurrentes tout au long de l'année et, finalement, à la reprise des hostilités le 18 mars 2025.
Reprise des hostilités
La reprise des hostilités aurait fait plus d'un millier de morts dans la bande de Gaza [1]. Les ordres d'évacuation multiples et successifs ont semé la peur et la confusion autour des installations. Les zones d'évacuation sont désormais proches du mur sud de l'hôpital de campagne, ce qui en fait un hôpital de première ligne et l'un des rares hôpitaux de campagne encore pleinement opérationnels à Rafah. Cependant, depuis la reprise des hostilités, aucun blessé venu du sud n'a pu atteindre l'hôpital de campagne, les déplacements de civils dans les zones d'évacuation étant extrêmement dangereux. Tous les patients de ces dernières semaines viennent de zones situées au nord de l'hôpital.
[1] Au 17 avril
Tragédie au sein de la famille Croix-Rouge/Croissant-Rouge
Dans la nuit du 23 mars 2025, huit médecins du Croissant-Rouge palestinien (CRP) ont été tués alors qu'ils tentaient d'atteindre des blessés qui avaient appelé une ambulance. Il a été confirmé par la suite qu’un autre médecin, dont on ignorait le sort pendant plusieurs jours, a été arrêté. Le droit international humanitaire est clair : il accorde une protection particulière aux structures et au personnel médicaux, qui doivent être respectés et protégés en toutes circonstances. Toutes les parties doivent veiller à ce que les hôpitaux et les structures médicales restent des sanctuaires pour préserver la vie humaine.
Certains de ces médecins travaillaient régulièrement de façon bénévole à l'hôpital de campagne de la Croix-Rouge tout au long de l'année. Nous avons travaillé ensemble, ri ensemble, sauvé des vies ensemble et pleuré ensemble ceux que nous n'avons pas pu sauver. Alors, quand nous disons : "leur perte est la nôtre", nous le pensons au sens propre du terme. »
Sally Khald Abu Borhum, psychologue à l'hôpital de campagne de la Croix-Rouge.
Principaux chiffres (depuis le 9 mai 2024)
Consultations
L'hôpital de campagne est ouvert du dimanche au jeudi, mais le service des urgences reste ouvert 24h/24, 7j/7 et le week-end, et sert ponctuellement de service ambulatoire. Au cours de l'année écoulée, les 60 lits de l'hôpital de campagne ont accueilli 2 000 patients. La répartition complète par tranche d'âge et par sexe est disponible dans la section « Informations démographiques sur les patients ».
Interventions chirurgicales
Juste après la reprise des hostilités le 18 mars, l'hôpital de campagne a constaté une augmentation de 50 % du nombre d'interventions chirurgicales, tandis que le nombre de patients admis a diminué d'environ 10 %. La semaine du 13 au 19 avril a enregistré le plus grand nombre de consultations externes et aux urgences depuis la création de l'hôpital de campagne, avec 2 396 patients admis ou amenés à l'hôpital. Depuis l'ouverture de l'hôpital de campagne, ces interventions chirurgicales comprennent des interventions de chirurgie générale (54 %), l'ablation de peau ou de tissus morts ou infectés (33 %), des interventions orthopédiques (8 %) et autres (5 %).
Accouchements
Plus de 13 % des accouchements ont dû être réalisés par césarienne (54 césariennes ; 354 accouchements par voie basse).
Physiothérapie
La première phase du cessez-le-feu (du 19 janvier au 2 mars) et la période précédant la reprise complète des hostilités (le 18 mars) ont offert à certains habitants de Gaza un répit, leur permettant de commencer à se remettre de leurs difficultés depuis octobre 2023. Cette période de calme relatif a également permis à l'hôpital de campagne de mettre en place un programme de révision de moignons d'amputation, en collaboration avec d'autres prestataires de soins de santé [1]. Ce programme s'inscrit dans le cadre des soins de santé à moyen et long terme nécessaires aux victimes de guerre dans la mesure où les interventions sanitaires durent toujours plus longtemps que le conflit actif. Ceci est particulièrement pertinent pour les enfants dont les os continuent de grandir jusqu'à ce que leur corps soit pleinement développé. La reprise des hostilités a entraîné la suspension de la planification des interventions médicales à moyen et long terme, les hôpitaux et les établissements de santé étant contraints de se limiter à nouveau aux interventions d'urgence.
Soutien psychosocial et santé mentale
Depuis mai 2024, les patients bénéficient de séances individuelles pour les aider à gérer le stress du conflit. Des séances de groupe ont été proposées aux patients et/ou à leurs aidants afin de répondre à des besoins spécifiques en matière de santé mentale et de soutien psychosocial. De plus, des séances familiales ont été proposées à certains patients et à leurs aidants afin d'aider ces derniers à gérer leur stress et à mieux accompagner les patients.
Une enquête menée entre le 11 et le 13 mars 2025 a révélé que 88 % des personnes interrogées ont perdu leur domicile ou des membres de leur famille, que 70 % souhaitent un soutien émotionnel, mais que seulement 50 % y ont accès. Interrogées sur leur état émotionnel au cours des deux semaines précédant l'enquête :
- 66% souffraient d'inquiétude persistante ;
- 62 % avaient des souvenirs pénibles liés à la guerre ;
- 58 % constataient une perte d'intérêt pour les activités quotidiennes ;
- 34 % se sentaient désespérées ;
- 28 % se sentaient inutiles ;
- 24 % avaient eu des pensées suicidaires.
Parmi les parents ayant des enfants, 50 % constatent des symptômes psychologiques chez leurs enfants depuis octobre 2023.
Anesthésies
36 605 anesthésies générales, 12 906 anesthésies régionales et 9 311 anesthésies locales ont été administrées. Ces anesthésies sont pratiquées pour diverses interventions médicales à l'hôpital de campagne, notamment la sédation pour les interventions courtes, le soulagement de la douleur lors du changement de pansements et l'anesthésie générale pour les interventions chirurgicales nécessitant une intubation.
Données démographiques des patients
Sur les 80 241 patients reçus en consultation externe et aux urgences :
- 54 % sont des hommes ;
- 46 % sont des femmes ;
- 37 % sont des enfants de moins de 18 ans :
- 12 % ont moins de 5 ans ;
- 17 % ont entre 5 et 14 ans ;
- 8 % ont entre 15 et 17 ans.
Une patiente (Juwan) | Credit: Ghaydaa Abu Samaan, CICR
Ces données coïncident avec celles d’autres établissements de santé et hôpitaux de campagne, comme l’hôpital de campagne UK-Med, également situé à Rafah, qui a signalé qu’environ 40 % de ses patients ont moins de 18 ans.
Ressources, défis et préoccupations
L'hôpital de campagne n'a pas été conçu pour supporter de multiples changements saisonniers, qui engendrent une usure accrue de son infrastructure. Néanmoins, l'atelier et l'équipe technique continuent de réparer les ruptures et les fuites dès leur apparition, assurant ainsi la continuité des activités de l'hôpital.
Les systèmes de purification d'eau par osmose inverse de l'hôpital de campagne ont sauvé de nombreuses vies. Depuis son ouverture, l'hôpital a produit plus de 2 200 tonnes d'eau potable pour répondre aux besoins des patients, de leurs soignants et du personnel. Lorsque les besoins sont criants et que les ressources sont indisponibles dans les autres locaux des équipes de la Croix-Rouge à Rafah, l'eau potable y est également acheminée.
La gale reste un problème majeur chez les patients [2], représentant plus de 30 % des cas ambulatoires ces dernières semaines. Des nettoyages en profondeur plus fréquents sont prévus pour atténuer les risques d'infection.
L'approche de l'été entraîne une hausse des mouches domestiques. Des moustiquaires ont été installées pour prévenir les infections, la priorité étant donnée aux patients hospitalisés devant garder leurs plaies ouvertes après une opération.
Le 24 mars 2024, un local du CICR situé à 150 mètres de l'hôpital de campagne a été touché en raison du conflit armé. Plus tard, le 16 avril, un autre bureau du CICR a été touché.
En conséquence, le complexe résidentiel des délégués de l'hôpital de campagne a été réaménagé pour inclure un entrepôt de fortune. La base logistique du CICR, située à environ 600 mètres au sud de l'hôpital de campagne, a été évacuée, se trouvant désormais dans la zone d'évacuation décrétée par les Forces de défense israéliennes (FDI), ce qui rend l'accès difficile pour l'acheminement rapide du matériel et des articles stockés. Des solutions temporaires ont été trouvées pour stocker les équipements sans perturber les opérations de l'hôpital.

