Bagdad / Genève (CICR) – « Il est capital de restaurer le tissu social si l'on veut que l'Irak parvienne à tourner la page des violences passées », a déclaré le président du Comité international de la Croix-Rouge (CICR) à l'occasion de sa visite dans le pays en février dernier, qui l'a notamment conduit à Mossoul, Bagdad et Erbil.
Le président du CICR, Peter Maurer, a souligné les défis colossaux auxquels sont encore confrontées les communautés à travers le pays : ainsi, alors que les principales opérations de combat ont pris fin il y a plus d'un an, on dénombre encore 1,8 million de déplacés internes, dont près d'un tiers vivent toujours dans des camps.
« Quand on parcourt le pays, on ressent toujours le même choc devant l'ampleur des destructions matérielles, mais il ne faut pas oublier les blessures moins visibles causées par la destruction du tissu social, qui sont très profondes dans l'Irak d'aujourd'hui », a déclaré M. Maurer.
« Pour que le pays se relève, la société doit s'engager dans un processus de réconciliation. Dans le cadre de ce processus, le nécessaire doit être fait pour que tous les Irakiens déplacés qui souhaitent rentrer chez eux puissent le faire en toute sécurité, sans discrimination », a poursuivi M. Maurer.
Le président du CICR a ajouté que les conditions propices au retour devaient d'abord être réunies, rappelant que les besoins humanitaires de l'ensemble de la population demeuraient immenses.
« On ne peut pas brûler les étapes, a déclaré M. Maurer. Les gens ont besoin de logements décents et d'un accès aux services essentiels, à commencer par l'eau potable et les soins de santé ; ils doivent aussi pouvoir subvenir à leurs besoins et vivre en sécurité, ce qui suppose d'enlever les munitions non explosées disséminées sur le territoire irakien. »
S'agissant du processus de réconciliation, crucial pour le relèvement du pays, M. Maurer a insisté sur l'obligation de garantir à tous les détenus, quels que soient les charges formulées à leur encontre et leur pays d'origine, un traitement judiciaire équitable et des conditions de détention dignes.
Le président du CICR a également déclaré qu'il fallait impérativement faire la lumière sur le sort des personnes toujours portées disparues par suite des divers conflits qui ont déchiré l'Irak au cours des dernières décennies, et dont le nombre est estimé à plusieurs centaines de milliers.
« Toutes les personnes sans nouvelles d'un être cher doivent obtenir les réponses à leurs interrogations, a-t-il affirmé. À Mossoul, j'ai rencontré des familles à la recherche d'un fils, d'un père, d'un mari. Elles m'ont expliqué l'épreuve émotionnelle quotidienne qu'était pour elles le fait de ne pas savoir ce qu'il est advenu de leurs proches. Il est temps que la société irakienne – à commencer par les autorités – s'emploie avec détermination à apaiser leurs souffrances. »
Si les traces des violents combats qui ont dévasté Mossoul sont encore bien visibles, quelques signes encourageants témoignent d'un début de retour à la vie normale. « Les gens nettoient leurs maisons, enlèvent les gravats ; certains ont même ouvert des échoppes dans la partie ouest de la ville, la plus durement touchée par les destructions, a constaté M. Maurer. C'est là une belle preuve de la résilience de la population irakienne. »
Au cours de sa visite de quatre jours en Irak (du 1er au 4 février dernier), M. Maurer a rencontré le président Barham Salih, le premier ministre Adel Abdel Mahdi, le vice-premier ministre Fouad Hussein et le président du parlement Mohammed al-Halbousi, et les a assurés de la détermination du CICR à continuer, aux côtés de ses partenaires du Croissant-Rouge irakien, de venir en aide à la population tout au long de la phase de relèvement dans laquelle le pays s'est engagé après plusieurs cycles de violence et d'instabilité.
En 2018, en Irak, le CICR a :
- amélioré l'accès de plus de 2,5 millions de personnes à l'eau potable en remettant en état 47 systèmes d'approvisionnement en eau ;
- distribué des colis de vivres à 340 000 personnes, des articles ménagers essentiels à 275 000 personnes, et des aides en espèces à 120 000 personnes ;
- facilité plus de 300 000 consultations dans les 17 centres de soins de santé primaire et les deux hôpitaux qu'il soutient ;
- contribué à élucider plus de 1 050 affaires de disparition et ouvert 5 250 nouveaux dossiers de recherche de personnes disparues ;
- permis à plus de 39 400 personnes handicapées de bénéficier de services de réadaptation physique dans le centre qu'il gère à Erbil et dans 15 autres centres qu'il soutient ;
- visité plus de 54 000 détenus dans 91 lieux de détention et aidé à rétablir ou maintenir le contact entre les membres de familles dispersées, dont des détenus, en facilitant l'échange de 28 420 messages écrits et oraux.
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