La décision de l'Assemblée mondiale de la Santé marque une étape dans la protection des soins de santé

12 juillet 2016
La décision de l'Assemblée mondiale de la Santé marque une étape dans la protection des soins de santé
Un hôpital endommagé, à Taiz, au Yémen. CC BY-NC-ND / CICR / Wael Al Absi

Les services de soins de santé ont été victimes de 594 attaques, à l'origine de 959 morts et de 1561 blessés. Plus de la moitié des attaques étaient dirigées contre des établissements de santé et un quart contre des agents de santé. Soixante-deux pour cent des attaques visaient délibérément les services de soins de santé. Ces chiffres ont été révélés dans un rapport de l'Organisation mondiale de la Santé (OMS) publié récemment, portant sur 19 pays confrontés à des situations d'urgence entre janvier 2014 et décembre 2015.

Avec ces chiffres à l'esprit et compte tenu du fait que les services de soins de santé sont continuellement la cible d'attaques, il est indéniable que la réalisation d'objectifs comme la couverture sanitaire universelle et les objectifs de développement durable (ODD) est un réel défi. Mais des décisions importantes prises à la soixante-neuvième Assemblée mondiale de la Santé en mai pourraient rendre ce défi moins intimidant.

Nous avons demandé à Erin Kenney, du programme OMS de gestion des situations d'urgence, d'expliquer comment en matière de ressources humaines pour la santé, la stratégie mondiale à l'horizon 2030 pourrait permettre de protéger les soins de santé et de contrer la violence.

Erin Kenney : Le 27 mai, les États Membres de l'Assemblée mondiale de la Santé ont adopté cette stratégie décisive porteuse d'un projet pour accélérer les progrès vers la couverture sanitaire universelle et les ODD en garantissant un accès équitable aux agents de santé dans des systèmes de santé renforcés. Cette question est capitale : nous observons un déficit croissant de ressources humaines pour la santé au niveau mondial et un déséquilibre entre l'offre, la demande et les besoins des populations en personnels de santé. Nos modèles indiquent que d'ici 2030, il manquera 18 millions de personnes au sein du personnel de santé par rapport aux effectifs nécessaires pour réaliser les ODD et la couverture sanitaire universelle. La pénurie sera concentrée dans les pays à revenu faible et dans les pays à revenu intermédiaire, tranche inférieure.

Si nous voulons réaliser la couverture sanitaire universelle et les ODD, nous devons faire disparaître les obstacles au développement des ressources humaines pour la santé, qui sont plus importants dans les pays connaissant des conflits ou d'autres situations d'urgence. Dans ces pays, les difficultés liées par exemple au fait de recruter et de retenir le personnel peuvent être aggravées par des attaques visant les soins de santé. En l'absence de ressources humaines mondiales pour la santé fortes et résilientes, nous ne pouvons pas réaliser nos objectifs de santé publique. Et pour réaliser ces objectifs, nous devons d'abord protéger les agents de santé de la violence et créer un environnement de travail sûr, même – ou surtout – pendant les conflits et les autres situations d'urgence. Par sa décision, l'Assemblée mondiale de la Santé donne une impulsion supplémentaire et fournit aux États et à l'OMS des moyens pratiques pour y parvenir, en établissant quatre domaines d'action importants et des responsabilités :

Le rôle des États

1. Se situant dans la ligne de la résolution 69/132 de l'Assemblée générale des Nations Unies sur la santé mondiale et la politique étrangère, la stratégie mondiale charge les États Membres de renforcer et de promouvoir la sécurité et la protection du personnel et des établissements de santé et le respect des codes déontologiques. Ce qui comprend l'adoption d'un marquage universellement reconnu pour identifier les professionnels de la santé, leurs moyens de transport et les établissements dans lesquels ils exercent ; la formation des professionnels de la santé, des agents de l'État et de l'ensemble de la population ; des mesures appropriées destinées à assurer la protection physique des professionnels de la santé, de leurs moyens de transport et des établissements dans lesquels ils exercent ; et la mise en place de cadres juridiques nationaux (quand il y a lieu) pour lutter efficacement contre les actes de violence visant les professionnels de la santé.

2. Les États Membres sont chargés d'obtenir une vue d'ensemble des personnels de santé, y compris par la collecte de données sur les tentatives d'obstruction, les menaces et les attaques physiques à l'encontre des agents de santé, et d'établir des registres nationaux à cette fin.

Le rôle de l'OMS

3. L'OMS devrait définir des orientations normatives, soutenir les travaux de recherche pour dégager des politiques reposant sur des bases factuelles et faciliter la coopération technique lorsque des États Membres ou des acteurs concernés en expriment la demande, y compris pour des mesures de prévention afférentes à la sécurité et à la protection des agents de santé.

4. L'OMS est également chargée d'adapter, d'intégrer et de relier le suivi des cibles figurant dans la stratégie mondiale au nouveau cadre de responsabilité prévu dans les objectifs de développement durable et dans les résolutions de l'Assemblée générale des Nations Unies. L'OMS devrait aider les États à rassembler des données et soumettre un rapport sur la protection des agents de santé, fondé sur les expériences des États Membres et contenant des recommandations sur les mesures à prendre par les acteurs concernés, y compris les mesures préventives appropriées, telles que préconisées dans la résolution 69/132 de l'Assemblée générale des Nations Unies.

Pour de plus amples informations sur les travaux de l'OMS concernant les attaques visant les soins de santé :
http://www.who.int/hac/techguidance/attacks_on_health_care/en/