Les Principes fondamentaux : réaffirmer notre humanité, notre neutralité et notre impartialité
Déclaration de Tadateru Konoé, président de la Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, et Peter Maurer, président du Comité international de la Croix-Rouge
Le 50e anniversaire de l'adoption des Principes fondamentaux est l'occasion de réfléchir au rôle du Mouvement international de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge en tant qu'architecte d'une action humanitaire basée sur des principes, aussi bien hier qu'aujourd'hui et demain.
Si l'anniversaire que nous célébrons est celui de leur adoption officielle, ces principes ne sont pas simplement apparus du jour au lendemain en 1965. Ils se sont forgés au tout début de l'existence de la Croix-Rouge sur les champs de bataille de Solferino, et ont été façonnés par plus d'un siècle consacré à protéger la vie et la dignité des personnes touchées par des conflits armés et des catastrophes naturelles dans le monde entier.
Nos principes – humanité, impartialité, neutralité, indépendance, volontariat, unité et universalité – guident nos décisions, nourrissent notre réflexion et nous aident à configurer nos actions en fonction de la situation et de l'époque dans laquelle nous agissons. Ils nous donnent le courage et l'inspiration nécessaires pour répondre aux défis humanitaires les plus complexes et les plus redoutables de notre époque.
Les Principes fondamentaux sont le ciment qui unit notre Mouvement ; ils nous confèrent aussi notre identité particulière. Allez dans n'importe lesquelles des 189 Sociétés nationales et vous verrez que, malgré leur large éventail d'activités, elles s'appuient toutes sur une architecture commune qui crée l'espace sans lequel il ne peut y avoir d'action humanitaire : un espace fait d'un total attachement au principe d'humanité, et de la volonté de répondre aux besoins des communautés de manière impartiale et neutre.
Réaffirmer notre humanité
Nous célébrons l'anniversaire des Principes fondamentaux à un moment où des millions de personnes sont touchées par des conflits. La spirale de l'horreur a forcé des millions de personnes à fuir, déclenchant des mouvements de population à travers l'Europe et le Moyen-Orient, mais aussi l'Afrique, les Amériques et l'Asie. Pour beaucoup, la décision de fuir est dictée également par d'autres facteurs, notamment des catastrophes naturelles, la pauvreté, les effets du changement climatique et le manque de services essentiels. Pour un trop grand nombre d'entre eux, l'aide humanitaire est la seule bouée de sauvetage.
Au milieu de cette multiplicité de tragédies, cependant, les gestes d'humanité sont bien présents. Du Mexique à la Grèce et à l'Indonésie, des milliers de volontaires de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge se sont mobilisés pour fournir soins de santé de base, nourriture et eau, et pour aider des gens à reprendre contact avec leurs proches. C'est là juste un exemple parmi beaucoup d'autres ─ des séismes du Népal au tsunami de l'océan Indien en passant par le séisme d'Haïti ‒ où l'on a vu des volontaires de la Croix-Rouge travailler coude à coude avec leurs communautés pour leur apporter de l'espoir au-delà de la tragédie et du désespoir.
En ce 50e anniversaire de l'adoption des Principes fondamentaux, nous réaffirmons que l'humanité est la raison d'être de notre action. Nous ne nous sentons certes pas toujours de taille face aux problèmes auxquels nous sommes confrontés, mais, guidés par notre principe d'Humanité, nous ne nous dérobons pas devant les défis qui nous attendent.
Réaffirmer notre impartialité et notre neutralité
Si l'humanité est au cœur de la mission du Mouvement international de le Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, nous ne pouvons mener une action humanitaire efficace que si notre neutralité et notre impartialité sont compris et respectés.
Qu'il s'agisse d'eau potable ou de soins médicaux d'une importance vitale pour assurer la santé de base, nous fournissons nos services impartialement aux populations de tous bords dans un conflit, et à toutes les personnes touchées par une catastrophe, indépendamment de leur origine ethnique, de leur religion ou de leur nationalité. Le seul critère qui nous guide est le besoin ‒ uniquement le besoin.
Notre engagement impartial, cependant, voit trop souvent son image ternie par la suspicion. Pour une raison ou une autre, certains prétendent que notre assistance légitime des visées politiques ─ surtout lorsque nous devons négocier avec des groupes armés pour pouvoir la fournir. La réalité est tout autre : nous sommes en mesure de fournir nos services de manière impartiale parce que nous sommes une organisation neutre, mais il faut pour cela que notre identité neutre et impartiale soit acceptée et respectée.
La politisation de l'aide humanitaire est la plus grave menace qui pèse sur notre capacité d'apporter une assistance dans certaines parties du monde. En ce 50e anniversaire, rappelons-nous que pour maintenir notre accès et fournir nos services là où les besoins sont les plus pressants, nous devons faire en sorte que notre neutralité et notre impartialité ne soient plus détournées à des fins politiques. Nous appelons les
États à respecter notre neutralité, et nous demandons instamment aux acteurs humanitaires de faire preuve d'une rigoureuse impartialité dans la fourniture de l'aide qu'ils apportent.
Il peut être déroutant et incertain de naviguer sur les eaux inconnues de l'humanitaire d'aujourd'hui, mais c'est là que les Principes fondamentaux donnent leur pleine mesure. Depuis 150 ans, ils sont notre boussole et guident nos choix éthiques et opérationnels. En ce 50e anniversaire de leur adoption officielle, marquons une pause pour proclamer que, même aujourd'hui, les Principes fondamentaux conservent toute leur pertinence pour la protection et l'assistance humanitaires. Nous devons continuer à les cultiver, réaffirmer notre détermination à les appliquer, et les faire connaître aux nouvelles générations.
Pourquoi ?
Parce qu'ils fonctionnent.