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Venezuela : manifestations, conflit armé et droit international humanitaire

Réponses aux questions les plus fréquentes

Pourquoi est-il erroné de considérer les manifestations comme un conflit armé ?

En droit international, les critères suivants doivent être réunis pour qu’une situation puisse être qualifiée de conflit armé :

  1. les groupes armés doivent être suffisamment organisés pour mener des opérations militaires (autrement dit, pour conduire des hostilités) ;
  2. ces groupes doivent être en mesure de poursuivre des opérations sur une durée prolongée ;
  3. les affrontements armés doivent être de nature militaire ;
  4. ils doivent opposer les forces armées gouvernementales et des groupes armés organisés, ou de tels groupes entre eux ;
  5. ils doivent se produire sur le territoire d’un État.

En résumé, pour qu’une situation entre dans la catégorie des conflits armés, des affrontements doivent mettre aux prises des groupes armés dotés d’une organisation, d’un armement et d’une capacité de combat de type militaire. Or, cela n’est pas le cas lorsque la force publique intervient dans une manifestation et qu’il en résulte des violences. En termes juridiques, il est dit que ces situations « n’atteignent pas le seuil du conflit armé ».

Le droit international humanitaire (DIH) s’applique-t-il aux manifestations au cours desquelles surviennent des incidents violents ?

Non, il ne s’applique pas à ces situations. Celles-ci relèvent : des normes du droit international des droits de l’homme, plus connues comme les droits de l’homme, qui protègent toutes les personnes, quelles que soient les circonstances ; des normes internationales relatives au recours à la force (dans le cas des opérations de maintien et de rétablissement de l’ordre public) ; et des lois en vigueur dans l’État en question.

Par conséquent, le DIH ne s’applique pas à ces situations ; autrement dit, celles-ci ne relèvent pas des quatre Conventions de Genève, ni de ses trois Protocoles additionnels. Le DIH s’applique uniquement aux conflits armés, qu’ils soient internationaux ou non internationaux. Il vise à limiter les moyens et les méthodes de guerre qu’emploient les parties au conflit, dans le but de protéger les personnes qui ne prennent pas part à celui-ci (ainsi que leurs biens), et celles qui ont cessé de participer aux combats (blessés, malades, prisonniers, etc.).

Peut-on déclencher l’application des Conventions de Genève ?

Non, cela n’est pas possible. Les Conventions de Genève sont conçues pour s’appliquer dès lors qu’un conflit armé existe, de la même façon que d’autres normes du droit, telles que les droits de l’homme, s’appliquent sans qu’il soit nécessaire de les « mettre en action ».

Quel est le rôle du CICR ?

Le CICR est une institution humanitaire indépendante et neutre qui protège et assiste les victimes de conflits armés et d'autres situations de violence. Nous intervenons dans les situations d'urgence, et nous nous employons également à promouvoir le respect du DIH et son intégration dans les législations nationales.

Le CICR a aussi pour rôle de dialoguer, de manière directe et confidentielle, avec les autorités et d’autres acteurs pertinents, afin de leur faire part de ses préoccupations au sujet des personnes touchées par de telles situations. Il est important de rappeler qu’en vertu des principes de neutralité, d’humanité, d’impartialité et d’indépendance qui guident notre action, nous nous abstenons de prendre part aux hostilités et de nous exprimer sur les positions des parties concernées.

En outre, nous nous attachons à diffuser et à promouvoir le droit international humanitaire ainsi que les normes internationales relatives au recours à la force, en fournissant des conseils et en favorisant les mesures nécessaires à leur mise en œuvre. C’est la raison pour laquelle nous organisons au Venezuela des ateliers à l’intention des forces armées et de sécurité.

Fidèle à notre mission, à nos principes et à l’approche confidentielle de notre travail, nous avons soutenu les efforts de la Croix-Rouge vénézuélienne pour apporter les premiers secours au cours des manifestations qui ont eu lieu ces derniers mois. Pour ce faire, nous avons notamment mis à disposition des moyens nécessaires au transport des volontaires, des rations d’eau à distribuer et du matériel chirurgical de base. De même, nous évaluons en permanence en quoi notre contribution peut être optimisée pour alléger les souffrances des personnes touchées par ces situations.

Il n’appartient pas au CICR d’enquêter, de dénoncer ou de juger. Ces tâches relèvent de la compétence des autorités judiciaires.