Irak : permettre aux familles de personnes disparues d’avoir accès à une aide juridique
Aucun mot n’est assez fort pour décrire l’angoisse et le sentiment d’incertitude que ressentent les familles lorsqu’un des leurs disparaît. À cette terrible situation s’ajoutent les difficultés qu’elles rencontrent pour comprendre certaines questions juridiques et accéder à des voies légales, notamment en vue d’obtenir des documents administratifs, d’élucider le sort de leurs proches disparus ou d’identifier des restes humains. Le sentiment d’impuissance qui en découle peut alors les plonger dans un profond désespoir.
L’impact pour les familles
En Irak, les familles de personnes disparues rencontrent d’immenses difficultés pour accéder à des documents officiels indispensables, ce qui a une incidence sur leur statut juridique et leur accès à différents services. Conscients de ces difficultés, le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) et l’Ordre du barreau irakien (Iraqi Bar Association – IBA) ont signé, en février 2023, un protocole d’accord visant à inciter les avocats inscrits auprès de l’IBA à prodiguer des conseils juridiques aux familles de personnes disparues inscrites au programme d’accompagnement du CICR et à assurer leur représentation en justice.
Ce protocole d’accord a été renouvelé en avril 2024, ce qui a permis d’augmenter le nombre de familles bénéficiaires (qui est passé de 48 en 2023 à 420 en 2024) et de couvrir six zones où le programme d’accompagnement est mis en œuvre. Le protocole établit un partenariat stratégique entre le CICR et l’IBA permettant de faciliter les démarches de ces familles pour obtenir des documents administratifs indispensables, tels que des actes de naissance, des cartes nationales d’identité, des documents de curatelle et des certificats de décès. Au cours de la première année de mise en œuvre du protocole, deux zones géographiques ont été couvertes : Saqlawiya, dans le gouvernorat d’Anbar, et le gouvernorat de Kirkouk. En 2024, le protocole a inclus le nord du gouvernorat de Babil, le gouvernorat de Dohouk et Talafar, Abu Maria et Sinjar dans le gouvernorat de Mossoul.
Principaux résultats à ce jour à Saqlawiya et Kirkouk (d’autres cas sont encore en cours de traitement)
Communication entre les avocats et les familles
Pour assurer une communication fructueuse et des services efficaces, plusieurs séances ont été organisées à l’intention des familles de personnes disparues participant au programme d’accompagnement du CICR à Saqlawiya. Ces séances comprenaient une séance d’information dirigée par trois avocats de l’IBA à l’intention de 25 accompagnants, suivie de dix séances regroupant des familles, des accompagnants et des avocats en vue d’attribuer les cas et de séances de suivi. Le CICR a également organisé plusieurs réunions et discussions avec différentes autorités, notamment le pouvoir judiciaire, afin de faciliter l’obtention de documents.
Sabrin Kareem, dont le mari est porté disparu, raconte son expérience : « Cette aide m’a permis d’obtenir les cartes nationales d’identité unifiées de mes deux enfants. Nous avons pu accéder plus facilement à de nombreux services et avantages, comme l’inscription officielle à l’école, la protection sociale et d’autres programmes mis en œuvre par des ONG et des institutions gouvernementales. » Elle souligne les difficultés liées à l’obtention de documents officiels qui, sans cette aide, lui aurait coûté entre 400 000 et 800 000 dinars irakiens – une dépense qu’elle ne pouvait pas se permettre au vu de ses frais de subsistance.
Abdelhameed Fadel, l’un des avocats volontaires pour le projet, indique : « Un de mes proches est porté disparu, donc je comprends très bien la souffrance des familles. » Il ajoute : « La coordination entre le CICR et l’IBA est si fructueuse que j’ai commencé à recevoir des appels de familles de personnes disparues d’autres gouvernorats, tels que Salah al-Din et Karbala, qui n’étaient pas envoyées par le CICR mais qui sollicitaient mon aide pour leurs démarches administratives ». Un tel succès témoigne des retombées et de la demande généralisées de l’initiative.
L’avenir
Le protocole d’accord entre l’IBA et le CICR a permis à de nombreuses familles de personnes disparues de se voir délivrer des documents essentiels et de recevoir un appui juridique, ce qui a eu des retombées bénéfiques directes sur leur existence. Le succès de ce protocole d’accord peut être attribué aux efforts dévoués de six avocats de l’IBA, dont l’engagement et la collaboration avec le CICR et les autorités locales ont permis aux familles de bénéficier d’un appui et de conseils indispensables.
Le programme d’accompagnement en Irak
Depuis 2021, le CICR conduit une série de programmes ciblés dans différentes régions d’Irak pour aider les familles de personnes disparues à faire face à la « perte ambiguë » de proches disparus. Le programme d’accompagnement vise à répondre aux multiples besoins pouvant découler de l’absence d’un être cher par l’établissement de réseaux de soutien. Il est axé sur les difficultés juridiques, administratives et économiques que rencontrent les familles et contribue à atténuer leurs besoins en matière de santé mentale et de soutien psychosocial en créant des liens entre elles.
Si vous vivez en Irak et que l’un de vos proches est porté disparu, n’hésitez pas à nous contacter pour toute question. Vous pouvez appeler gratuitement notre centre d’appel communautaire au 80022222. Notre équipe se tient à votre disposition pour vous fournir une aide en kurde, arabe et anglais, du dimanche au jeudi, de 8 h 30 à 15 h 30.