Page archivée: peut contenir des informations obsolètes

Au secours des personnes déplacées de l'Ouganda rural

31-08-2007 Éclairage

Le CICR continue de fournir des semences et une assistance essentielle à des centaines de milliers de personnes déracinées par le conflit armé qui sévit dans le nord de l'Ouganda. Un journaliste ougandais, Denis Ocwich, décrit une distribution de secours dans un camp éloigné pour personnes déplacées.

     
    ©CICR/D. Ocwich      
   
    Les déplacées du camp d'Acokara, dans le district d’Oyam, reçoivent des articles ménagers essentiels et des semences du CICR.      
           
   

       
    ©CICR/D. Ocwich      
   
    Moses Oyuku, 35 ans, père de cinq enfants, vend des choux au marché en bordure de route, dans le camp d'Acokara. Il les a plantés avec les semences que lui a données le CICR.      
           
   

         
    ©CICR/D. Ocwich      
   
    Les enfants jouent dans l’enceinte de l'école primaire d'Acokara en attendant d'aider leurs parents à transporter les secours distribués par le CICR.      
           

Il a fallu deux heures en voiture, sur des routes mouillées, boueuses et cahoteuses, pour nous rendre de la ville de Gulu (nord de l'Ouganda) au camp pour déplacés à Acokara, qui se trouve dans le sous-comté rural d'Otwal (district d'Oyam).

Notre convoi, composé de deux Land Cruisers et de deux camions transportant des secours et arborant le drapeau de la Croix-Rouge, a été accueilli par une foule en liesse, qui attendait impatiemment les semences, les couvertures et le savon que le CICR allait distribuer. En effet, par ces distributions, le CICR s'efforce, d'une part, d'améliorer les conditions de vie des personnes déplacées et, d'autre part, de les aider à devenir plus autonomes.

C'était la deuxième fois cette année que le CICR venait dans ce camp pour y distribuer des secours, camp où s'étaient installées quelque 10 000 personnes qui avaient fui leurs villages à cause du conflit que se livraient l'Armée de résistance du Seigneur ( Lord’s Resistance Army – LRA) de Joseph Kony et les forces gouvernementales ougandaises.

À 11 heures du matin, le domaine verdoyant de l'école primaire d'Acokara s'était transformé en véritable ruche, où des milliers de personnes faisaient la file pour recevoir leur part des secours : deux couvertures, trois barres de savon, un sachet de 1 kilo et demi de graines de simsim (sésame) et un sac de 3 kilos de semences de légumes par ménage.

On pouvait entendre le bavardage et les rires des femmes portant leur bébé sur le dos, des personnes âgées s'appuyant sur une canne et des enfants qui avaient séché l'école pour aider leurs parents à porter les secours.

Après avoir passé quatre ans dans de minuscules huttes faites de boue et de clayonnage dans ce camp bondé, les personnes déplacées se préparent à rentrer chez elles, suite à la trêve signée l'année dernière entre la LRA et le gouvernement ougandais. Mais beaucoup hésitent encore à quitter le camp, soit par crainte de la reprise des combats, soit par manque d'abris ou de nourriture.

Serrant contre lui une paire de couvertures qu'il vient de recevoir, Nikolas Acika, 77 ans, du village d’Apurukec, raconte : « Je reste encore dans le camp, mais j'espère être installé dans ma maison d’ici la fin de l’année. »

Accompagné de sa petite-fille de six ans, Everline Acen, Acika, nu-pieds, se rappelle l'aide qu'il a reçue précédemment du CICR. « Ils ont commencé à nous aider en 2004, quand on est arrivé dans le camp. Depuis, j'ai reçu des outils agricoles comme des houes et des faucilles, des semences, du savon et des couvertures. »

La distribution d'une aide non alimentaire est une des opérations principales du CICR dans le nord de l'Ouganda, une région qui doit encore se remettre de 21 ans de luttes civiles.

L'insurrection aurait déplacé près de 2 millions de personnes, à son point culminant, en 2004. Certaines sont cependant rentrées chez elles depuis lors. La violence a frappé plus de 20 districts du nord et du nord-est du pays.

La moitié de la population du nord de l'Ouganda, autrefois très dynamique écon omiquement, dépend aujourd'hui de la bonne volonté des organisations humanitaires.

Selon Christine Cipolla, chef de la sous-délégation du CICR à Gulu, l'institution mène ses activités dans 26 des 53 camps des districts de Gulu, Amuru et Oyam. Jusqu'à 44 000 ménages (220 000 personnes) ont bénéficié de cette aide cette année. Au total, dans le nord de l'Ouganda, 770 000 personnes ont reçu une assistance du CICR en 2007.

« Notre idée, déclare Christine Cipolla, c’est de leur permettre de devenir autonomes, surtout en cette période où le gouvernement encourage les personnes déplacées à retourner dans leurs villages. Bien sûr, il restera toujours des besoins non satisfaits, mais nous avons essayé d'atteindre le plus grand nombre possible de personnes », ajoute-t-elle.

Au début de cette année, le CICR a distribué des outils agricoles et des semences (maïs, haricots, choux, oignons et tomates, entre autres) pour aider les déplacées à commencer à planter.

« Bien que les haricots et quelques autres semences n’aient pas donné de bonnes récoltes en raison des fortes pluies, nous sommes contents que certains puissent faire la récolte avec les graines du CICR, qu'ils ont plantées », explique Patrick Opige, le chef du camp d’Acokara.

Pendant que la distribution des secours avait lieu à Acokara, nous nous sommes promenés dans un marché tout proche où des légumes frais tels que choux, maïs et tomates étaient vendus.

« Avec les semences que la Croix-Rouge m'a données, j'ai pu planter quatre carrés de choux dans les marécages de Baluk ; et voici le produit », raconte Moses Oyuku, 35 ans, père de cinq enfants, en nous montrant tout joyeux le tas de choux qu'il est en train de vendre. « Je vends chaque chou entre 100 et 500 schilli ngs. En un jour, je gagne au moins 5 000 schillings (trois dollars US). » Ce qui n'est pas un mauvais rendement pour une personne qui vit dans ce village calme où le coût de la vie est particulièrement bas.

Pour aider à redynamiser la production alimentaire, le CICR emploie notamment des observateurs locaux et des agronomes qui donnent des conseils sur les meilleures pratiques en matière d'agriculture. Certains fermiers ont été entraînés pour enseigner à leur tour à leurs collègues les bonnes pratiques agricoles.

Malgré les pourparlers de paix en cours, les personnes déplacées hésitent encore à se réinstaller dans leur milieu rural. Beaucoup manquent de nourriture et d'abris ; leur maison est, soit en ruine, soit entièrement brûlée. Par conséquent, comme elles commencent à se mettre en route pour quitter le camp et retourner chez elle, répondre à leurs besoins sur le plan humanitaire restera une priorité. Rajeunir la productivité agricole est donc une manière efficace de donner à la communauté touchée par la guerre une sécurité économique solide.