Born organise l'hébergement, la nourriture et la protection de dizaines de milliers de personnes en Hongrie qui ont été sauvées de la déportation, grâce à la distribution de visas ou de certificats d'émigration de complaisance, accordés notamment par le Suédois Raoul Wallenberg et le diplomate suisse Carl Lutz. Born a également réussi à sauver environ 7 000 enfants juifs, qui ont été accueillis dans des foyers et des hôpitaux protégés par la Croix-Rouge. Copyright CICR

Friedrich Born, cet employé de la Croix-Rouge qui sauva des milliers de Juifs en Hongrie

Friedrich Born, délégué du CICR en poste à Budapest entre mai 1944 et mars 1945, n’a ménagé aucun effort pour épargner des vies au cours des mois de troubles qui ont précédé la fin de la Seconde Guerre mondiale. Avec un groupe d’autres personnes fortement engagées, il a sauvé des milliers de Juifs en leur offrant la protection du CICR, en leur délivrant des papiers d’identité et en plaçant certains bâtiments sous la protection de l’institution.
Article 02 mai 2024 Hongrie

Des milliers de Juifs, dont environ 7000 enfants, ont eu la vie sauve grâce au courage extraordinaire de Friedrich Born et de plusieurs de ses collègues : Robert Schirmer, Hans Weyerman, le Dr Horvath et d'autres humanitaires hongrois.

Pendant la Seconde Guerre mondiale, des centaines de milliers de Juifs ont été persécutés en Hongrie et beaucoup ont péri dans les camps de la mort nazis. Le CICR a à plusieurs reprises exprimé publiquement ses regrets de n'avoir pas fait davantage pour protéger les Juifs et les autres victimes contre l'extermination lors de ce conflit.

L'idée de rester le témoin impuissant et passif de ces funestes événements m'est insupportable.

Friedrich Born

L'œuvre de Friedrich Born, accomplie au péril de sa propre vie, mérite d'être commémorée. Il s'est vu décerner en 1987 le titre de « Juste parmi les nations » par Yad Vashem, l'Institut international pour la mémoire de la Shoah.

Le 5 juin 1987, Friedrich Born s'est vu décerner à titre posthume le titre de « Juste parmi les nations » par l'Institut Yad Vashem de Jérusalem.
Le 5 juin 1987, Friedrich Born s'est vu décerner à titre posthume le titre de « Juste parmi les nations » par l'Institut Yad Vashem de Jérusalem. CICR

CHRONOLOGIE DE L'ACTION DE FRIEDRICH BORN À BUDAPEST

Mai 1944 : Friedrich Born commence à travailler pour le CICR à Budapest

Il proteste devant le gouvernement hongrois contre la déportation des Juifs vers l'Allemagne et la Pologne, et dénonce les conditions dans lesquelles ils sont détenus auprès des autorités nazies. Ses protestations sont toutefois ignorées et ses demandes de visite aux Juifs déportés en Allemagne, refusées.


Juillet 1944 : à la demande du président du CICR, le gouvernement hongrois suspend les déportations, sauvant ainsi quelque 15 000 vies

Avec l'aide du pasteur luthérien Gábor Sztehlo et d'autres personnes, Born établit 60 foyers abritant plus de 7000 enfants ayant besoin de protection ; le CICR leur fournit de la nourriture et des soins médicaux jusqu'en décembre 1944. Un millier d'autres enfants sont hébergés à l'abbaye de Pannonhalma, sous la protection de l'emblème de la croix rouge.


Août 1944 : les forces nazies reprennent les déportations

Born propose que toutes les maisons de Budapest occupées par des Juifs soient placées sous la protection du CICR, mais cette idée est écartée par crainte que les plaques protectrices ne mettent les habitants juifs en danger.


Octobre 1944 : suite au coup d'État du 15 octobre orchestré par les nazis, la persécution des Juifs de Budapest s'intensifie sous le nouveau gouvernement

Bien que les protestations répétées de Born soient rejetées par les autorités hongroises et nazies, il parvient à obtenir quelques petites concessions. Tous les hôpitaux, les abris et les cuisines collectives juifs sont placés sous la protection du CICR. Born délivre des papiers d'identité à environ 3000 volontaires, juifs pour la plupart, ainsi que des documents leur conférant le statut de personne protégée. Les protections accordées par le CICR sont publiquement reconnues par le gouvernement hongrois, mais ne sont pas toujours respectées.


Novembre 1944 : plusieurs milliers de Juifs en partance pour l'Allemagne sont détenus dans une usine de la banlieue de Budapest

Le CICR leur fournit des soins de santé, des médicaments et 3000 colis alimentaires par jour. Born négocie quant à lui une ordonnance spéciale qui permet à 7500 déportés de retourner à Budapest. Le CICR place sous sa protection plusieurs bâtiments du ghetto de Budapest. Il s'efforce aussi d'obtenir des concessions qui amélioreraient les conditions de vie dans le ghetto et emploie 285 Juifs pour organiser diverses activités d'assistance. Le CICR distribue en outre de la nourriture et des médicaments dans les camps et le long des routes de déportation, et recueille des informations que Born utilise dans ses démarches auprès des autorités.


Décembre 1944 : alors que l'armée soviétique progresse et que les nazis tentent de transférer tout ce qui a de la valeur vers l'Allemagne, le CICR intervient à Budapest pour protéger des infrastructures essentielles

Born parvient à deux reprises à empêcher des déportations à l'hôpital juif de Városmajor utca, où 154 patients, médecins et infirmières seront néanmoins tués le 14 janvier 1945.


Février 1945 : pendant le siège de Budapest, le CICR se retrouve à court de fournitures et a du mal à nourrir les quelque 7000 enfants hébergés dans 60 foyers

Ils sont transférés à Buda dans des centres d'accueil gérés par l'Église et la nouvelle administration de la ville. Le CICR se procure à Pest – qui est prise la première par les troupes soviétiques – des vivres pour continuer de nourrir les enfants, la ville étant toujours coupée du reste du pays.


Mars 1945 : Budapest est entièrement sous contrôle soviétique

Le CICR, qui a épuisé ses réserves financières et ses stocks de nourriture et de médicaments, tente de se réapprovisionner à l'étranger. Born fait l'objet de soupçons pour être resté neutre et avoir maintenu des contacts avec les autorités hongroises, allemandes et russes, ainsi qu'avec des organisations juives, dans le cadre de ses efforts pour aider les victimes de la guerre. Il est forcé de quitter Budapest le 31 mars 1945.