Mesures visant à éliminer le terrorisme international - déclaration du CICR aux Nations Unies, 2016

05 octobre 2016

Assemblée générale des Nations Unies, 71e session, déclaration du CICR, New York, octobre 2016.

Le terrorisme est la négation du principe d'humanité et va à l'encontre des autres principes et objectifs fondamentaux qui sous-tendent le droit international humanitaire. Le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) condamne les actes de terrorisme, qu'ils soient ou non perpétrés dans le cadre d'un conflit armé, et quels qu'en soient les auteurs ; il est aussi profondément préoccupé par les effets dévastateurs que ces actes ont sur les personnes et les communautés touchées.

L'augmentation du nombre de groupes armés non étatiques qui se livrent à des actes de terrorisme suscite des inquiétudes croissantes, tant au plan national qu'international. Cette situation a poussé les États et les organisations internationales à réagir en durcissant les mesures de lutte contre le terrorisme déjà en place et en en adoptant de nouvelles.

Le CICR ne conteste pas la légitimité des États à prendre les mesures nécessaires pour assurer leur sécurité et éliminer le terrorisme. Ce faisant, il convient néanmoins de veiller à ce que les règles qui protègent la vie et la dignité humaines soient respectées.

Nous estimons que la communauté internationale se doit d'adopter une ligne claire et ferme sur la nécessité de mener les activités de lutte contre le terrorisme dans le plein respect de la protection accordée à toute personne par le droit international, notamment par le droit international humanitaire et le droit international des droits de l'homme. La communauté internationale a d'ailleurs tout à y gagner, puisqu'on s'accorde aujourd'hui de plus en plus à reconnaître que les violations de ces branches du droit risquent d'exacerber le phénomène que les mesures antiterroristes cherchent précisément à combattre. Les dispositions de ces corps de droit international doivent en particulier être observées lorsque des personnes sont arrêtées et détenues pour des motifs liés au terrorisme. Il y a également lieu de permettre à des organismes de surveillance indépendants et neutres, comme le CICR, d'avoir accès à ces personnes, de façon à ce qu'ils puissent aider les autorités détentrices à faire en sorte que les détenus soient traités avec humanité et dans le respect des lois et normes internationales applicables.

À maintes occasions depuis 2011, le CICR a attiré l'attention sur les effets potentiellement néfastes que peuvent avoir sur l'action humanitaire les mesures de lutte contre le terrorisme adoptées par les États, tant au niveau national qu'international. En particulier, les législations pénales en la matière devraient être rédigées de manière à ne pas compromettre ni entraver les activités humanitaires, comme l'engagement d'un dialogue avec les groupes armés non étatiques sur des questions humanitaires, même lorsque ces groupes sont qualifiés de « terroristes ».

Les activités de caractère purement humanitaire et impartial devraient notamment être exclues du champ d'application des législations pénales contre le terrorisme. Selon nous, cette exclusion serait conforme à la lettre et à l'esprit du droit international humanitaire et, partant, compatible avec les obligations qui incombent aux États au titre de ce droit. Le maintien de ces activités dans le champ d'application des législations pénales antiterroristes impliquerait le rejet de la notion d'action humanitaire neutre, impartiale et indépendante – une approche que le CICR s'efforce de promouvoir dans son travail sur le terrain. Cela risquerait aussi de compromettre l'action d'organisations humanitaires impartiales qui ont pour mission d'apporter protection et assistance aux personnes touchées par des conflits armés, en particulier dans des régions contrôlées par des groupes armés non étatiques.

La nécessité ressentie aujourd'hui de lutter plus efficacement contre les menaces émanant de groupes et d'individus qualifiés de terroristes a également relancé les discussions entre les États autour du projet de convention générale sur le terrorisme international. Dans la mesure où les conflits armés pourraient entrer dans le champ d'application de ce projet, le CICR estime qu'il est essentiel d'y inclure une disposition régissant la relation entre la convention et le droit international humanitaire. Cet ajout serait le seul moyen de réduire au minimum les chevauchements et les contradictions entre le projet de convention générale et ce corps de droit.

L'inclusion d'une telle disposition ainsi que sa formulation seront essentielles pour préserver l'intégrité et la raison d'être du droit international humanitaire. Le projet de convention générale devrait en particulier éviter d'ériger en infractions des actions qui, dans les situations de conflit armé, sont autorisées ou ne sont du moins pas interdites par le droit international humanitaire, comme le fait d'attaquer des objectifs militaires ou des personnes non protégées contre les attaques directes. De notre point de vue, il faudrait partant veiller à ce que tout accord concernant les dispositions du projet de convention générale sur le terrorisme international soit compatible avec les principes et définitions de base du droit international humanitaire.

La déclaration en :