15ème Assemblée des États parties à la Convention sur l'interdiction de l'emploi, du stockage, de la production et du transfert des mines antipersonnel et sur leur destruction, Santiago, Chili, 28 novembre – 2 décembre 2016. Allocution de Lorenzo Caraffi, chef de la délégation régionale du CICR pour l'Argentine, le Brésil, le Chili, le Paraguay et l'Uruguay
La Convention sur l’interdiction des mines antipersonnel a eu des résultats tangibles et sauvé de nombreuses vies depuis son entrée en vigueur il y a 15 ans. Plus de 51 millions de mines antipersonnel qui étaient stockées ont été détruites. Vingt-six États parties ont débarrassé leur territoire des mines antipersonnel, éliminant ainsi la menace que représentaient ces armes. Des efforts concertés sont aussi déployés pour répondre aux besoins des victimes de mines antipersonnel.
Si ces progrès ne suffisent pas à convaincre de l’efficacité de la Convention, il n’y a qu’à regarder l’exemple de l’Amérique latine. Dans les années 1990, les pays de la région touchés par les mines antipersonnel comprenaient le Costa Rica, le Chili, la Colombie, l’Équateur, El Salvador, le Guatemala, le Honduras, le Nicaragua et le Pérou. Aujourd’hui, la plupart de ces pays ont nettoyé leurs zones contaminées et les travaux pour éliminer les mines restantes sont bien avancés. Grâce aux efforts conjugués fournis pour mettre en œuvre la Convention, l’Amérique latine est en passe de devenir une région libérée des dangers des mines antipersonnel.
Mais malgré ces évolutions positives, force est de constater qu’une énergie et une volonté communes doivent être mobilisées pour progresser vers un monde sans mines. Les mines antipersonnel, y compris improvisées, ont toujours un impact inacceptable sur les civils et les communautés dans un trop grand nombre de pays et de territoires – impact que le Comité international de la Croix-Rouge (CICR) continue d’observer et d’atténuer dans ses activités au quotidien. En Colombie, par exemple, nous voyons la façon dont les mines antipersonnel et les restes explosifs de guerre limitent l’accès de la population aux services essentiels. En 2015, en collaboration avec la Croix-Rouge colombienne, nous avons aidé plus de 18 000 personnes à réduire leur vulnérabilité face aux mines antipersonnel en construisant ou en réparant des installations d’approvisionnement en eau, des abris et des écoles dans les zones contaminées. Le déminage fait aussi partie de l’accord de paix trouvé entre le gouvernement colombien et les FARC-EP, et le CICR a facilité deux projets pilotes de déminage dans le cadre du processus de paix.
À la Conférence d’examen de 2014, les États parties ont annoncé leur intention d’atteindre les principaux objectifs de la Convention d’ici à 2025. Ce jour ne viendra jamais trop tôt pour les communautés touchées. Alors que s’ouvre cette 15ème Assemblée des États parties, le CICR souhaite mettre en évidence plusieurs domaines qui devraient, selon lui, être au centre de l’action concertée engagée afin de respecter l’échéance de 2025.
Premièrement, il s’agit de renforcer les normes interdisant l’emploi des mines antipersonnel et d’intensifier les efforts visant à rendre la Convention universelle. On rapporte malheureusement que des mines antipersonnel seraient posées dans le cadre de plusieurs conflits en cours, et le CICR est vivement préoccupé par les informations de l’Observatoire des mines selon lesquelles le nombre de victimes de telles mines auraient fortement augmenté pendant l’année écoulée. Nous devons continuer de diffuser les messages humanitaires contenus dans la Convention auprès de ceux qui utilisent encore des armes de ce type. L’emploi de mines antipersonnel par quelque acteur que ce soit est inacceptable, et les États parties comme les organisations humanitaires doivent l’affirmer clairement. De plus, les États qui n’ont pas encore adhéré à la Convention doivent être enjoints de le faire sans délai. Ceux qui dialoguent avec des groupes armés non étatiques et qui exercent une influence sur eux doivent aussi agir.
Deuxièmement, nous devons veiller au respect de l’article 5 et du processus de demande de prolongation. De l’avis du CICR, la Convention et la décision prise par la 12ème Assemblée des États parties établissent les exigences applicables concernant la réponse à donner à la contamination par les mines antipersonnel, qu’il s’agisse d’un phénomène nouveau ou existant. Beaucoup d’États parties touchés par les mines antipersonnel se sont déjà vu accorder des prolongations du délai de dix ans prévu par la Convention. Mais si nous voulons atteindre l’objectif de 2025 fixé dans la Déclaration de Maputo, il faudra accélérer le déminage et réduire le besoin de nouvelles demandes de prolongation. En outre, les États dont le délai initial de dix ans a déjà expiré ou expirera bientôt doivent déposer une demande de prolongation aussitôt que possible.
Enfin, pour que les survivants des mines antipersonnel puissent participer à la vie en société dans des conditions d’égalité, nous devons faire davantage pour éliminer les obstacles auxquels ils sont confrontés. Il s’agit notamment d’évaluer les besoins des victimes, d’identifier les lacunes dans les services en place et de s’assurer que des ressources adéquates soient allouées à ces activités. Il importe aussi de rappeler que les survivants ont des besoins spécifiques durant toute leur vie et que l’obligation d’assistance à leur égard se maintient bien après que la dernière mine a été retirée du sol.
Pour conclure, beaucoup a été accompli dans le cadre de la Convention et beaucoup reste à faire. L’échéance de 2025 se profile à l’horizon et nous sommes convaincus qu’avec dévouement et détermination, nous pourrons parvenir à un monde sans mines antipersonnel. Le CICR se réjouit à la perspective de continuer de coopérer avec vous pour faire de ce but une réalité.