Mauritanie : revoir son fils... enfin !

12-01-2011 Éclairage

Ce n'est pas un jour comme les autres pour les membres de la famille d'Ali (prénom fictif), détenu à Guantanamo depuis 2001. Depuis la mission du CICR à Nouakchott, la capitale mauritanienne, ils vont pouvoir enfin parler à Ali et le voir grâce à une vidéoconférence. Et ce, pour la première fois depuis son arrestation.

     
    ©ICRC/S. Beltifa      
   
    Mauritanie. La maman d'Ali avec un délégué CICR recevant des nouvelles de son fils.      
           

La famille d'Ali a vécu sans nouvelles de lui jusqu'en 2004. Un message Croix-Rouge, délivré par un volontaire du Croissant-Rouge mauritanien a mis fin à trois ans d'inquiétude. La famille était enfin soulagée, car elle savait qu’Ali était bel et bien vivant ! Depuis, de nombreux autres messages Croix-Rouge ont été échangés entre le détenu et sa famille. Mais l'annonce de la vidéoconférence donne une toute autre dimension à ces échanges de nouvelles familiales.

Un peu avant neuf heures du matin, les frères et sœurs, neveux et nièces d'Ali sont arrivés et se sont installés dans les locaux de la mission du CICR à Nouakchott. Aidée par la famille, une dame âgée de 87 ans, devance la foule. C'est Mme Hindou (prénom fictif), la maman d'Ali. Elle a tenu à faire le déplacement malgré son âge et la maladie.

  Le moment est venu...  

À neuf heures précises, la tension est à son comble dans la salle. Tout le monde attend avec impatience l'établissement de la connexion avec Guantanamo.

Dès l'apparition de l'image du détenu sur l'écran de l'ordinateur, l'assistance commence à s'agiter. Hindou est la première à s’adresser à son fils. Ses premiers mots sont : « Est-ce que tu me reconnais ? Qu'est ce que tu attends pour rentrer au pays ? » Ces mots plongent dans le désarroi la sœur d'Ali qui éclate en sanglots.

Ali demande à sa mère de prier spécialement pour lui afin qu'il puisse vite retrouver la liberté. Une tradition mauritanienne veut que des prières spéciales de la mère permettent au fils de se sortir d'une situation inextricable.

Tour à tour, les autres membres de la famille parlent à Ali. Soucieux de l'avenir de ses deux neveux, présents à l'entretien, Ali leur prodigue des conseils de courage et d'abnégation pour la poursuite de leurs études.

Quand la mère d'Ali a entendu parler pour la première fois de la vidéoconférence, elle n'en croyait pas ses oreilles. Elle ne voulait pas nourrir de faux espoirs. À la vue de son fils après tant d'années d'absence, elle l'a trouvé plus âgé, « avec beaucoup de cheveux blancs ».

Hindou espère être encore en vie le jour du retour de son fils au pays. De temps en temps, elle hume les messages Croix-Rouge, gardés jalousement dans un coffret, pour essayer de sentir l'odeur de son fils adoré.

 
       
     
   
    Depuis septembre 2009, le CICR a organisé 13 vidéoconférences pour permettre aux détenus de Guantanamo d'échanger des nouvelles avec leurs familles en Libye, au Maroc, en Mauritanie et en Tunisie. Jusqu'à présent, les détenus à Guantanamo ou à Bagram (Afghanistan) et leurs proches ont bénéficié de 65 appels téléphoniques. En parallèle, le CICR continue d'assurer l'échange de messages Croix-Rouge.