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Ouganda : un projet eau et assainissement ramène l'espoir dans les camps de déplacés

10-09-2007 Éclairage

Avec une population de 46 000 personnes, Pabbo est le plus grand camp de déplacés du district de Gulu – un camp où s'entassent des habitants des zones rurales qui ont fui en raison du conflit armé au début des années 1990. Le journaliste ougandais Denis Ocwich décrit un projet d'approvisionnement en eau et d'assainissement mis en place par le CICR, qui donne un regain d'espoir aux déplacés en améliorant la santé dans les camps.

     
    ©CICR/W. Akwat      
   
    Camp de Pabbo, district de Gulu/Amuru. Paul Oketta, chef de l'équipe de personnes ressources communautaires (CORP) interviewé par le journaliste Denis Ocwich (à gauche).      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    Nouvelles latrines construites avec le soutien du CICR dans le camp de Pabbo.      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    District de Gulu. Christine Akongo assise avec son fils sur le bout de terrain bien balayé qui entoure sa hutte dans le camp de Pawel. L'équipe CORP formée avec l'aide du CICR encourage les résidants du camp à garder les lieux propres et bien entretenus.      
           
   
       
    ©CICR/W. Akwat      
   
    Les volontaires CORP écoutent un délégué Eau et habitat du CICR pendant leur réunion hebdomadaire de promotion de l'hygiène.      
           


    Voir également Promotion de la santé communautaire à Gulu    

Toute personne de l'extérieur déambulant parmi des myriades de huttes au toit de chaume compact ne peut qu'imaginer l'existence que mènent les habitants de ce camp de personnes déplacées, dans le nord de l'Ouganda. Face à une population désespérée de plus de 46 000 âmes entassée sur une petite superficie, les infrastructures sociales sont vouées à l'effondrement. Pourtant, la vie doit continuer.

Situé à 40 km de la ville de Gulu, Pabbo est le plus grand camp regroupant des déplacés, pour la plupart des ruraux, qui ont fui la campagne depuis le début des années 1990 à cause de l'insurrection de l'Armée de résistance du Seigneur (LRA) menée dans la région par Joseph Kony.

Jusqu'il y a deux ans, le camp connaissait de fréquentes flambées de choléra qui faisaient de nombreuses victimes. Cela était attribué surtout au manque de latrines à fosse, à la saleté des lieux et à l'insuffisance des sources d'approvisionnement en eau – une eau par ailleurs de qualité médiocre.

  La saleté appartient maintenant au passé  

« L'assainissement et l'hygiène étaient catastrophiques. Le camp était jonché de détritus et d'excréments d'enfants », dit Paul Oketta, chef d'une équipe de 50 personnes ressources ( Community Owned Resource Persons, CORP ) constituée au sein de la communauté, qui a notamment pour mandat de mobiliser et d'éduquer les résidants en matière d'hygiène communautaire. Le CICR a dispensé la formation nécessaire à ce groupe – composé de volontaires, hommes et femmes – lorsque la situation s'est détériorée dans les camps l'année dernière.

Des équipes communautaires de personnes ressources ont également été constituées dans six autres camps de personnes déplacées situés dans les districts de Gulu et Amuru : les camps de Pawel, Lugore, Palaro, Tegot, Bibia et Lulim. Dans tous, le niveau de propreté s'est amélioré. L'air ambiant a une meilleure odeur que par le passé, les ordures sont balayées et le nombre des latrines à fosse a considérablement augmenté (tout comme leur qualité). 

Si, dans certains cas, une vingtaine de personnes doivent encore partager les mêmes toilettes, c'est beaucoup mieux que la situation antérieure, où l'on pouvait compter jusqu'à 100 personnes obligées de faire la queue.

« C'était terrible ! On creusait des latrines de fortune mais au bout d'un mois elles étaient pleines. Le camp était beaucoup trop peuplé », raconte Alfred Latigo, 47 ans, qui vit à Pabbo depuis dix ans.

Une nuée d'enfants excités et curieux nous suit en courant alors que, tout en mangeant du maïs grillé, nous nous dirigeons vers l'endroit où des rangées de latrines sont en construction près des baraquements de l'armée à Pabbo. Sur quelques structures, le toit vient d'être posé ; dans d'autres, on en est encore à construire les murs ou à creuser les fosses. Un réel motif de satisfaction : il semble que les enfants aient eux aussi compris la nécessité de garder le camp propre. On est impressionné de les voir emporter consciencieusement le corps d'un chiot écrasé par une voiture pour le jeter dans une des fosses.

  De nouvelles latrines et un camp plus propre  

Dans le temps, la plupart des latrines étaient des constructions précaires, faites de matières végétales ou de polyéthylène. Maintenant, on utili se des blocs, des dalles de béton armé et des feuilles de tôle, ce qui rend les structures plus durables et plus faciles à entretenir. Depuis l'année dernière, le nombre de latrines dont dispose le camp a énormément augmenté, grâce à un projet mis en œuvre par le CICR dans le domaine de l'approvisionnement en eau, de l'habitat et de l'assainissement

Ce projet comprend la construction de latrines et des activités visant à garder propres les zones d'habitation et les environs du camp, notamment en balayant les périmètres autour des constructions et en taillant les buissons. D'autres activités consistent par exemple à faire ou réparer des forages et à amener par canalisations de l'eau salubre pour la boisson et d'autres usages domestiques. 

Dans chacun des camps bénéficiant du projet « eau et assainissement » du CICR, les personnes ressources rencontrent chaque semaine des membres du personnel du CICR et de la Croix-Rouge de l'Ouganda pour évaluer l'état d'hygiène ou approuver la construction de nouvelles toilettes.

« L'équipe vient ici tous les mercredis, et nous devons faire en sorte que nos maisons et tout le périmètre soient propres », explique Christine Akongo, mère de six enfants, en montrant le sol balayé à Pawel.

Depuis l'année dernière, plus de 2 600 latrines à fosse ont été construites dans le cadre du projet « eau et assainissement » du CICR. Pour chacune des latrines à deux ou trois compartiments, le CICR fournit du bois de construction, des dalles de béton armé, des outils pour le creusement des fosses, des feuilles de tôle et d'autre matériaux pour le toit. Les bénéficiaires (personnes déplacées) doivent faire les blocs, creuser les fosses et fournir la main-d'œuvre nécessaire pour la construction », précise Maung Maung Thu-Rein, le délégué Eau et habitat de la sous-délégation du CICR à Gulu.

Dans les camps, de jeunes volontaires aident les malades, les personnes physiquement handicapées et les personnes âgées à construire leurs latrines.

« Au début de cette année, la Croix-Rouge m'a donné des dalles et du bois pour construire de nouvelles latrines pour nous. Mon petit-fils m'aide maintenant à le faire », dit Anjulina Laker, une veuve d'une soixantaine d'années dont la chambre-avec-coin-séjour de la Zone C-2 du camp de Pabbo est une cabane construite en matériaux de polyéthylène.

Après la mise en place de ce projet « eau et assainissement », les cas de choléra, de diarrhée et d'autres maladies dues au manque d'hygiène ont chuté de 50 %. De plus en plus, des latrines à toit de tôle et à murs en blocs remplacent les constructions de fortune recouvertes de chaume.

« Le projet de notre unité Eau et habitat a un impact énorme et qui se fait sentir rapidement, et pourtant il ne faut pas un gros budget pour le réaliser », précise Christine Cipolla, chef de la sous-délégation du CICR à Gulu. Les volontaires CORP sont motivés par un « témoignage de reconnaissance » d'un montant de 10 000 shillings ougandais (environ 6 dollars) par semaine.

Le message écrit dans la langue locale ( acholi ) sur les T-shirts gris donnée par le CICR que portent les volontaires pendant une réunion au camp de Pawel résume la situation : «Kacel Watwero Medo Rwom me Lengo i Gang », ce qui signifie : « Ensemble, nous pouvons améliorer le niveau d'hygiène et d'assainissement chez nous ».