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De jeunes étudiants polonais commencent à «explorer» le droit humanitaire

24-11-2004

Inciter les jeunes à réfléchir aux enjeux humanitaires qui se posent dans le monde violent d’aujourd’hui : tel est le but d’un programme éducatif lancé en 2001 par le CICR. Intitulé « Explorons le droit humanitaire » (EDH), ce programme se met actuellement en place dans 70 pays du monde entier. Marcin Monko, du CICR, fait le point de la situation en Pologne.

 


« Explorons le droit humanitaire » en classe 

    Le programme EDH vise à introduire une dimension humanitaire dans la manière dont les jeunes perçoivent les événements qui surviennent dans leur pays et à l’étranger. En leur faisant mieux connaître et mieux comprendre le droit international humanitaire, l’action menée auprès des jeunes vise à les inciter à respecter le droit lorsqu’ils seront adultes. Depuis son lancement en 2001, le programme EDH a été mis en œuvre dans plus de 70 pays.      
   
 
 

Il y a une soixantaine d’années, ce quartier était au cœur du ghetto juif de Varsovie ; nous sommes à quelques minutes de marche de l’ Umschlagplatz, le point de rassemblement d’où sont partis des milliers de Juifs polonais, déportés vers le camp d’extermination nazi d’Auschwitz. Bien que situé non loin du centre de Varsovie, la capitale polonaise, ce quartier est aujourd’hui calme et verdoyant.

C’est là que se trouve l’éc ole à laquelle le Prince Poniatowski a donné son nom et qui fait partie des 40 établissements d’enseignement secondaire polonais qui, depuis l’automne 2004, participent au projet pilote « Explorons le droit humanitaire ».

Cette école a une histoire singulière. Elle a été créée en 1919, au lendemain de la Première Guerre mondiale, afin de donner une éducation aux soldats démobilisés, dont beaucoup n’avaient pas encore 20 ans, et elle a reçu le nom du Prince Jozef Poniatowski, chef militaire célèbre de l’époque de la lutte pour l’indépendance polonaise, dans les premières années du XXe siècle. Aujourd’hui « Poniatowka », comme les élèves appellent familièrement leur école, figure parmi les établissements d’enseignement les plus prestigieux de Varsovie, et elle attache un prix tout particulier à ses liens historiques avec les forces armées.

     

  Honorer un engagement pris par l’Union européenne  

C’est donc dans ce cadre que Mme Ursula Ciborowska présente le droit international humanitaire à ses élèves. « Pourrait-on trouver à Varsovie meilleur endroit que cette école pour commencer un programme comme celui-ci ? », demande Mme Ciborowska. Ne parle-t-on pas du Genius loci, le génie du lieu ?

 
    L'étudiante Zuzanna Kulinksa durant un cours du programme EDH à l'école du Prince Poniatowski à Varsovie Warsaw© CICR Budapest 
 
Le ministère de l’Éducation et des Sports a approuvé le programme au début de cette année, souhaitant ainsi honorer l’engagement pris par l’Union européenne (UE) lors de la XXVIIIe Conférence internationale de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge, en décembre 2003. Le programme EDH sera inclus dans divers cours (éducation civique, formation en matière de protection civile et histoire) destinés à des élèves âgés de 16 à 19 ans.

La Croix-Rouge polonaise apporte son appui à l’introduction du programme EDH dans les écoles et elles assure cette année la gestion du projet pilote. Un soutien technique et financier est fourni par la délégation régionale du CICR pour l’Europe centrale, basée à Budapest, en Hongrie. La traduction du matériel didactique a également été réalisée à la demande de la Croix-Rouge.

  Militaires polonais en action  

« On me demande parfois si, dans un pays comme la Pologne qui n’a pas connu de guerre depuis plus d’un demi siècle, un tel enseignement se justifie, et pourquoi il se justifi e », déclare Boris Polieganov, le coordonnateur du programme EDH au siège de la Croix-Rouge polonaise à Varsovie. « Je réponds que des militaires polonais servent aujourd’hui en plusieurs points du globe – Bosnie-Herzégovine, Kosovo, plateau du Golan, Liban, Irak et Afghanistan – et que les jeunes doivent savoir ce que cela signifie réellement. Bien sûr, il n’y a pas de guerre en Pologne, mais nous devons mieux comprendre ce qu’est la guerre et savoir que même la guerre a des limites ».

En général, les jeunes apprécient les cours du programme EDH, car ils sont encouragés à discuter et à partager leurs opinions. « Heureusement, dans notre pays, la guerre n’est présente que sur les écrans de télévision ; c’est pourtant bien de parler de ces problèmes – chacun de nous a sa propre opinion, et ces leçons jettent une lumière différente sur ce que nous apprenons dans les cours d’histoire et sur ce que nous voyons dans les journaux ou à la télévision », déclare Zuzanna Kulinska après son premier cours EDH.

Élève de la « Poniatowka », Zuzanna travaille comme volontaire au bureau de Varsovie d’une organisation internationale de défense des droits de l’homme. Le drame survenu dans l’école de Beslan (Fédération de Russie) a attiré l’attention des jeunes sur les enjeux humanitaires ; en même temps, les ONG à vocation humanitaire se multiplient en Pologne et le pays est appelé à s’engager pleinement dans la politique humanitaire de l’UE.

 

      Le programme EDH gagne du terrain en Europe de l’Est  

    En introduisant le programme EDH dans ses écoles, la Pologne a rejoint les deux premiers pays d’Europe de l’Est – la Lituanie et la Croatie – ayant déjà inclus le droit humanitaire dans leurs système d’enseignement secondaire. Par ailleurs, les ministères de l’Éducation de quatre autres pays de la région – Bulgarie, Lettonie, Roumanie et Slovaquie – se sont engagés auprès du CICR à lancer le programme EDH au cours du premier semestre de 2005.      
   
 
 

En devenant membre des alliances qui unissent les pays d’Europe de l’Ouest, la Pologne a atteint ses principaux objectifs de politique étrangère ; le pays s’efforce maintenant de se positionner sur la scène internationale. Les problèmes mondiaux sont de plus en plus souvent abordés dans les débats publics. « Le moment est vraiment favorable pour commencer à réfléchir aux besoins et aux problèmes des autres », déclare Boris Poleganov.

     

  Un nombre croissant d’établissements participent au programme EDH  

Il est prévu que le nombre d’établissements participant au programme EDH augmente au cours de l’année scolaire, à mesure que de nouveaux enseignants recevront la formation dispensée par la Croix-Rouge et par le Centre national de formation continue des enseignants, un institut du gouvernement. La Croix-Rouge espère que, d’ici la fin de 2006, le programme EDH sera enseigné dans 800 établissements seco ndaires, soit environ un tiers de leur nombre total en Pologne

Le Dr Paul Vundi est un Kényan qui a épousé une Polonaise et a décidé de rester dans le pays. Il est professeur d’anglais dans une école secondaire catholique, dans le quartier de Bielany, à Varsovie. Dans sa salle de classe, qui domine la Vistule, le fleuve qui traverse Varsovie, le Dr Vundi projette un film sur les enfants soldats au Libéria.

« Mon expérience de médecin et mes origines africaines me donnent une autorité particulière lorsque je parle aux élèves des enjeux humanitaires », déclare le Dr Vundi. Ne pouvant pratiquer en Pologne, ce médecin trouve gratifiant de pouvoir enseigner l’anglais. De fait, le Dr Vundi a introduit le programme EDH dans les deux écoles de Varsovie où il donne des cours.

« Et, de plus, ce programme constitue une bien noble façon d’enseigner l’anglais ! », relève le Dr Vundi.