Déclaration du président du Comité international de la Croix-Rouge, Peter Maurer, à l'issue d'une visite de cinq jours en République démocratique du Congo (RDC), au cours de laquelle il a rencontré le président Joseph Kabila et s'est entretenu avec des habitants de régions récemment frappées par des flambées de violence, où le CICR mène des activités.
Nouvelles dynamiques de violence en République démocratique du Congo
Ces deux dernières années, la violence qui frappe le pays s’est étendue à de nouvelles régions comme le Kasaï et le Tanganyika, rendant la situation qui prévaut en RDC extrêmement complexe. La fragmentation de la violence et des groupes armés vient en effet s’ajouter aux violences intercommunautaires, à la criminalité et aux luttes pour le contrôle des ressources. D’où la nécessité que nous maintenions notre présence dans le pays. Une assistance humanitaire renforcée est désormais nécessaire et il faut que la communauté internationale prenne conscience des énormes besoins auxquels la population congolaise, loin des feux des médias, est aujourd’hui confrontée. Quant au CICR, il doit être attentif aux défis qui ne manqueront pas de surgir.
Partenariats humanitaires
Il est très fréquent que les humanitaires se substituent aux États qui faillissent à leurs obligations. Aussi convient-il que nous réfléchissions à nouveau à ce que nous attendons des États, dont la responsabilité est d’assurer des services essentiels à la population, en RDC comme ailleurs. Au CICR, nous devons faire preuve de souplesse et de capacité d’adaptation pour interagir avec des acteurs clefs ayant la volonté et la capacité de venir en aide aux plus vulnérables. Ce n’est qu’avec le concours d’acteurs locaux que le CICR parviendra à avoir un impact plus large.
La sécurité, un défi majeur pour le CICR
Les défis auxquels nous nous retrouvons confrontés dans le cadre de nos opérations sont généralement les mêmes partout, que ce soit en Syrie, en Afghanistan, en Irak ou en Somalie. Il arrive par exemple que les belligérants nous refusent l’accès, pour des raisons stratégiques qui leur appartiennent. Et c’est pour y remédier que, dans les conflits du monde entier, nous menons des activités de diplomatie humanitaire. La sécurité du personnel humanitaire est une autre préoccupation majeure. Chaque jour, nous avons à prendre des décisions difficiles, car il est bien rare que nous travaillions dans des régions sûres à cent pour cent. Chaque jour, nous nous demandons ce qui est le plus important : travailler en toute sécurité ou mener à bien notre mission humanitaire.
Préférer les solutions durables aux mesures d’urgence
De notre point de vue, l’action humanitaire doit permettre aux populations touchées de retrouver leur autonomie. C’est pourquoi nous avons commencé à réorienter nos activités, par exemple en investissant davantage dans la capacité des gens à subvenir eux-mêmes à leurs besoins en les aidant à ouvrir un petit commerce ou à maintenir ou augmenter leur production agricole, plutôt qu’en prolongeant indéfiniment les distributions de vivres. L’écart entre les besoins humanitaires et la capacité du secteur à y répondre demeurant considérable, nous cherchons activement des moyens d’investir plus judicieusement pour un impact humanitaire plus efficace.
Établir et maintenir le dialogue avec les porteurs d’armes
L’établissement et le maintien d’un dialogue avec les porteurs d’armes est un travail de longue haleine. Je suis convaincu que si nous pouvons agir sur le terrain, c’est en grande partie grâce à tout le travail de sensibilisation que nous faisons auprès des porteurs d’armes. Sans cela, nous ne pourrions pas mener notre action à bien. Sur la carte du monde, on voit bien que le CICR est présent dans des régions qui restent difficiles d’accès à la plupart des autres acteurs humanitaires. Le plus difficile, c’est d’obtenir des porteurs d’armes qu’ils renoncent à prendre la population civile pour cible. Nous sommes néanmoins convaincus que c’est en continuant de promouvoir les règles fondamentales du droit international humanitaire et en insistant sur la nécessité de les respecter que nous ferons évoluer les comportements. Mais l’impact de notre travail de persuasion est difficile à mesurer. En effet, comment évaluer le nombre de vies épargnées grâce à nos efforts de promotion du droit international humanitaire auprès des groupes armés ? Comment mesurer l’impact de nos appels à la retenue ? Il n’y a pas de réponse simple à ces questions.
Informations complémentaires :
Pedram Yazdi, CICR Kinshasa, tel: +243 81 700 85 36
Annick Bouvier, CICR Genève, tel : +41 79 244 64 05
Jean-Yves Clemenzo, CICR Dakar, tel : +221 78 639 86 29
Crystal Wells, CICR Nairobi, tel: +254 716 897 265