Servir et protéger : une police professionnelle dotée d'une bonne formation est cruciale dans les situations de violence

24-03-2010 Interview

Une action policière s'appuyant sur les règles et normes internationales applicables à cette fonction permet d'éviter de faire des victimes, ou du moins d'en réduire le nombre, lors des opérations de rétablissement de l'ordre public dans les situations de violence, souligne Pascal Progin à la fin de sa mission en tant que délégué du CICR auprès de la police et des forces de sécurité en Amérique latine et dans les Caraïbes.

     

    ©CICR      
   
Pascal Progin      
          Vous terminez une mission de deux ans en tant que délégué en Amérique latine. Pourquoi le CICR travaille-t-il avec les forces de police sur tout ce qui concerne l'usage de la force ?
 

La mission du CICR est de prévenir ou, au moins, d'alléger les souffrances des personnes touchées par les conflits armés et d'autres situations de violence. La police, pour sa part, doit garantir la sécurité de la population de son pays, et maintenir ou rétablir l'ordre public. Pour accomplir cette double tâche difficile, il lui arrive, dans des circonstances exceptionnelles, d'être obligée de recourir à la force, ce qui peut faire des victimes au ssi bien dans ses propres effectifs que dans la population civile. C'est de ce point de vue qu'il y a un lien entre le rôle de la police et la mission du CICR.
 

  En quoi consiste le travail du CICR auprès de la police ?
 

Le CICR, dans le cadre d'ateliers et de séminaires, collabore à la formation des corps de police aux règles et normes de droit international applicables à leur fonction. Il prête aussi son concours aux États pour l'intégration de ces règles et normes au niveau institutionnel. En améliorant la doctrine, la formation et l'entraînement de la police, on aboutit à un meilleur comportement des forces de police dans les situations de violence, ce qui permet de réduire le nombre de victimes.
 

  Depuis quand le CICR travaille-t-il avec les forces de police ?

En 1994, le CICR a commencé à travailler avec les forces de police d'Israël et des territoires palestiniens pour améliorer le dialogue avec ces forces et pour les aider à intégrer les principes humanitaires dans leurs programmes d'entraînement et leur doctrine. Des demandes d'appui et de conseil lui sont parvenues d'autres institutions policières. À partir de 1998, le CICR a également mis en œuvre son programme auprès des forces de police en Amérique latine, où il travaille actuellement avec les polices du Mexique, d'El Salvador, du Guatemala, du Honduras, du Panama, du Venezuela, de la Colombie, de la Bolivie, de l'Équateur, du Pérou, du Brésil, du Paraguay et d'Haïti.

     
    ©CICR      
   
Le CICR participe à des ateliers et séminaires de formation des policiers dans les règles et standards du droit international applicable à la fonction policière.      
         
Comment les forces de police d'Amérique latine ont-elles accueilli cette initiative du CICR ?
 

En Amérique latine, les forces de police jugent très positive cette action de diffusion des normes internationales applicables à leur fonction. Ce sont les dirigeants de ces mêmes forces de police qui encouragent leurs États respectifs à traduire ces normes en procédures concrètes.

Le CICR aide les institutions policières dans cette conversion des normes pertinentes en procédures concrètes – de type administratif ou opérationnel – qui permettent à leur tour à la police d'agir de manière plus professionnelle. Ce programme est très bien accepté par les États. 

  Comment peut-on évaluer l'impact du programme ?  

Il n'existe pas d'indicateurs précis pour évaluer l'impact du programme. Le comportement de la police pourrait être un élément d'appréciation, mais naturellement le programme du CICR n'est pas le seul facteur qui influe sur l'action policière.

Cela étant, le processus d'intégration des principes humanitaires applicables à la fonction policière en Amérique latine progresse de manière sensible. C'est un travail qui est réalisé par les États avec les conseils du CICR, lequel ne se substitue jamais à l'État.
 

Nous nous rendons compte que, dans certains pays, la doctrine s'est beaucoup développée en matière de protection des victimes, et d'usage légitime, nécessaire et proportionné de la force. Nous constatons aussi un plus grand respect des garanties judiciaires des personnes privées de liberté, ainsi que des conditions minimales applicables dans le domaine de la détention selon les normes internationales.

  Quels sont les objectifs visés à moyen et à long terme ?  

L'objectif principal pour 2010 est double : continuer à conseiller les États dans leur processus d'intégration des normes pertinentes dans leur système doctrinal, et parvenir à une plus grande acceptation de ces normes pour que, finalement, il y ait moins de victimes à cause du recours à la force, surtout dans les situations de violence.