Quelles sont les origines du droit international humanitaire ?
01-01-2004
Extrait de la publication CICR "Droit international humanitaire : réponses à vos questions"
Pour répondre à cette question… d’autres questions.
Quel était le droit en vigueur dans les conflits armés avant l’avènement du droit humanitaire contemporain ?
Il y a tout d’abord eu des règles non écrites, fondées sur la coutume qui ont réglementé les conflits armés. Puis, progressivement, sont apparus des traités bilatéraux plus ou moins élaborés (des cartels) que les belligérants ratifiaient parfois... après la bataille ; il y avait également des règlements que les États édictaient pour leurs troupes (cf. le Code de Lieber ci-dessous). Le droit alors applicable dans les conflits armés était donc limité dans le temps et dans l’espace en ce sens qu’il ne valait que pour une bataille ou un conflit précis. Ces règles variaient aussi selon l’époque, le lieu, la morale, les civilisations...
Qui sont les précurseurs du droit humanitaire contemporain ?
Deux hommes ont joué un rôle essentiel dans sa création : Henry Dunant et Guillaume-Henri Dufour. Dunant en a formulé l’idée dans Un Souvenir de Solférino, publié en 1862. Quant au général Dufour, fort de ses expériences d’homme de guerre, il lui a apporté très tôt un soutien moral et actif, notamment en présidant la Conférence diplomatique de 1864. Dunant : " Dans des occasions extraordinaires, comme celles qui réunissent (...) des princes de l’art militaire, appartenant à des nationalités différentes, ne serait-il pas à s ouhaiter qu’ils profitent de cette espèce de congrès pour formuler quelque principe international, conventionnel et sacré, lequel, une fois agréé et ratifié, servirait de base à des Sociétés de secours pour les blessés dans les divers pays de l’Europe ? " Dufour (à Dunant) : " Il faut que l’on voie par des exemples aussi palpitants que ceux que vous rapportez ce que la gloire des champs de bataille coûte de tortures et de larmes... "
Comment l’idée est-elle devenue réalité ?
Lorsque le gouvernement suisse, sous l’impulsion des cinq membres fondateurs du CICR, a convoqué en 1864 une conférence diplomatique à laquelle seize États ont participé et adopté la Convention de Genève pour l’amélioration du sort des militaires blessés dans les armées en campagne.
En quoi ce droit innovait-il ?
La Convention de Genève de 1864 posait les bases de l’essor du droit humanitaire contemporain. Les principales caractéristiques de ce traité sont notamment :
des normes permanentes écrites, d’une portée universelle et protégeant les victimes des conflits ;
un traité multilatéral, ouvert à l’ensemble des États ;
l’obligation de prodiguer des soins sans discrimination aux militaires blessés et malades ;
le respect et la signalisation, par un emblème (une croix rouge sur fond blanc), du personnel sanitaire, ainsi que du matériel et des équipements sanitair es.
" Dans l’ensemble, on peut trouver dans les méthodes de guerre des peuples primitifs l’illustration des divers genres de lois internationales de la guerre actuellement connues : lois qui distinguent différentes catégories d’ennemis ; règles définissant les circonstances, les formalités et le droit de commencer et de terminer une guerre ; règles prescrivant des limites aux personnes, aux saisons, aux lieux, ainsi qu’à la conduite de la guerre ; et même des règles qui mettent la guerre hors la loi. " (Quincy Wright)
Les premières lois de la guerre ont été proclamées déjà quelques millénaires avant notre ère par les grandes civilisations : " Je prescris ces lois afin d’empêcher que le fort n’opprime le faible. " (Hammourabi, roi de Babylone)
Nombre de textes anciens tels le Mahâbhârata, la Bible et le Coran contiennent des règles prônant le respect de l’adversaire. Par exemple, le Viqâyet, texte écrit à l’apogée du règne sarrasin en Espagne, vers la fin du XIIIe siècle, comporte un véritable code des lois de la guerre. La Convention de 1864 codifie donc et renforce, sous la forme d’un traité multilatéral, des lois et coutumes de la guerre, anciennes, fragmentaires et éparses, protégeant les blessés et le personnel soignant (cf. ci-après).