Ukraine : « Le nombre de morts, le niveau de destruction et le degré de misère sont abjects et inacceptables. »
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Le nombre de morts, le niveau de destruction et le degré de misère qui touchent les civils dans le cadre du conflit armé international en Ukraine sont abjects et inacceptables.
Alléger les souffrances et atténuer les conséquences humanitaires du conflit est une préoccupation essentielle du Comité international de la Croix-Rouge, de la Société de la Croix-Rouge d'Ukraine et de la Fédération internationale des sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et de ses membres.
Je m'adresse à vous aujourd'hui, en votre qualité de Hautes Parties contractantes aux Conventions de Genève, pour évoquer une question au cœur de notre mandat, à savoir : l'enjeu vital de l'action et du droit international humanitaire.
Point important : le droit international humanitaire, ou jus in bello, porte sur la façon dont les guerres sont menées. Il est uniquement humanitaire et cherche à limiter les souffrances causées. Il est indépendant des questions relatives à la justification ou aux raisons de la guerre, ou jus ad bellum, ce qui est un élément crucial.
Les Conventions de Genève et les Protocoles additionnels identifient certaines questions essentielles autour desquelles il est vital de trouver un consensus entre les parties, pour garantir un minimum d'humanité lors d'un conflit. Il s'agit de protéger les civils et les blessés, de permettre à l'aide humanitaire d'atteindre ceux qui en ont besoin, de traiter les prisonniers de guerre avec humanité, de prévenir les disparitions de personnes et de recueillir les dépouilles mortelles de manière digne. La loi est également claire sur les obligations de respecter et faire respecter le droit international humanitaire, y compris de faciliter l'accès de l'action humanitaire. Cet accès est une obligation, pas un point de négociation.
En tant qu'intermédiaire neutre, impartial et indépendant, le CICR sait qu'il est difficile de parvenir à un consensus sur des questions humanitaires. Nous saluons les accords déjà conclus par les parties, par exemple au sujet des passages sécurisés permettant à des personnes de quitter les zones d'hostilités, comme récemment à Marioupol. Cependant, les progrès sont trop lents et insuffisants, ce qui a entraîné des morts insensées et prolongé les souffrances. Nous avons pourtant vu qu'il est possible de conclure des accords et nous implorons les parties de redoubler d'efforts pour sauver des vies.
Aujourd'hui, le financement généreux de l'action humanitaire en faveur des personnes touchées par le conflit est essentiel. Mais ce n'est qu'une partie d'un tout, car pour répondre aux besoins de la population civile, ces fonds doivent se traduire de manière équitable en opération. Ainsi, l'espace pour une action humanitaire neutre, impartiale et indépendante doit être protégé, afin que les personnes en ayant le plus besoin puissent recevoir de l'aide, sans discrimination de nationalité, de race, de croyances religieuses, de classe ou d'opinions politiques, où qu'elles se trouvent.
Déjà présent en Ukraine depuis huit ans, le CICR, en collaboration avec la Croix-Rouge ukrainienne, intensifie massivement son action. Le soutien que nous apportons dans les localités de Kiev, Marioupol, Odessa, Donetsk, Louhansk et ailleurs prévoit une aide d'urgence comprenant de la nourriture, de l'eau et d'autres articles essentiels. Nous soutenons les hôpitaux et les centres de santé primaires en les dotant de matériel médical et en les préparant aux situations d'urgence. Nous nous efforçons également d'atténuer les impacts de la contamination par les armes et aidons à réparer les stations d'eau et les maisons endommagées.
Des dizaines de milliers de volontaires et d'employés locaux de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge à travers l'Europe travaillent sans relâche pour apporter leur soutien aux personnes dans le besoin. La Fédération internationale des Sociétés de la Croix-Rouge et du Croissant-Rouge et ses Sociétés nationales membres ont déjà apporté une aide vitale à plus d'un million de personnes touchées par le conflit.
La force de la Croix-Rouge, la plus grande organisation humanitaire au monde, réside dans sa combinaison de soutien mondial et communautaire. Notre expérience nous montre que pour avoir un impact maximal, nous devons travailler en étroite collaboration avec les communautés, renforcer les capacités des acteurs locaux, et travailler avec et par l'intermédiaire des gouvernements et des autorités locales. Notre objectif est de soutenir le développement des capacités des structures locales, en les rendant plus fortes et plus robustes.
Excellences, Mesdames et Messieurs,
Les bases de la reconstruction de l'Ukraine doivent être posées aujourd'hui, pour éviter de nouvelles souffrances humaines.
Les services essentiels à la survie de la population, tels que l'eau, l'électricité ou les soins de santé, doivent être maintenus. Ce maintien, dans les semaines et les mois à venir, permettra d'éviter les répercussions secondaires et d'atténuer la dégradation à plus long terme. En ce sens, l'action humanitaire de première ligne est un facteur de stabilisation vital dans des environnements fragmentés. C'est aussi un élément constitutif de la voie vers la réconciliation et vers les efforts de consolidation de la paix au sens large.
Ceux et celles qui traversent les horreurs de ce conflit ont besoin de solutions urgentes et pragmatiques pour le présent et l'avenir. Je vous demande instamment de soutenir une action humanitaire fondée sur des principes, et ainsi de faire votre part en faveur du respect du droit humanitaire international.
Merci du fond du cœur.